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mercredi 4 août 2021

Philippe GONIN : "Magma : décryptage d'un mythe et d'une musique"


Voici un ouvrage absolument incontournable pour décrypter et comprendre le mythe et l'énigme Magma, ses influences complexes et variées, la multitude de musiciens (le plus souvent très talentueux - on peut citer notamment Jannick Top et Didier Lockwood) qui ont accompagné Christian Vander le batteur-leader-compositeur depuis le lancement de la formation en 1969 et son univers si particulier. Un groupe unique, tellement à part, qu'il créera sa propre langue, le kobaïen et sera même à l'origine d'un style musical, le zeuhl, mélange d'influences qu'on peut sommairement définir comme se situant entre le jazz rock, le rock progressif, l'opéra wagnérien et la musique moderne du début du XXeme siècle...
Philippe Gonin signe un ouvrage très documenté, qui perce en partie le mystère Magma jusqu'à livrer quelques "secrets" (notamment sur la création des deux trilogies, clés de voute de l'oeuvre de Magma) sur un groupe qui tout en étant rigoureux et cartésien sait aussi manier à merveille la démesure et l'extravagance.

La première partie est consacrée à un survol de l'historique du groupe, ses débuts à une époque où le rock français était proche du néant hormis quelques rares formations telles Variations, Ange et deux ou trois groupes pop/rock comme Martin Circus, ses influences musicales (Carf Off, Bartok, Stravinsky, Wagner, le gospel et le rythm'n'blues, Pharoah Sanders et bien sûr John Coltrane, saxophoniste dont Christian Vander grand fan devant l'éternel ne s'est jamais remis du décès en 1967) et vocales (avec l'importance accordée par Magma aux choeurs, notamment féminins), sa cosmogonie (dont le fameux logo n'est que la partie la plus visible), son univers, sans oublier le côté spirituel de l'œuvre ...

La seconde partie est une analyse détaillée des albums y compris (mais davantage survolés) ceux d'Offering et les albums solo de Christian Vander ("Les cygnes et les corbeaux notamment").
L'auteur évoque l'instabilité chronique du groupe, la main mise de Christian Vander sur Magma, son apogée entre 1973 et 1976 (avec les albums "Mekanïk Destruktïw Kommandöh", "Köhntarkösz" et "Üdü Ẁüdü" - également le live 75 avec la présence de Didier Lockwood), son (relatif) déclin, sa mise en sommeil entre le milieu des années 1980 et 1992 et sa résurrection avec les albums "K.A" et "Ëmëhntëhtt-Rê". Mais aussi ses zones d'ombres notamment l'accusation qui sème le trouble au début des années 70, celle de véhiculer une idéologie fasciste, accusation qui ne sera jamais véritablement démentie (mais qui semble infondée). Quelques concerts seront perturbés mais cela nuira surtout à l'image du groupe. Si j'évoque ce thème, loin d'être central dans le livre, c'est qu'en découvrant Magma au début des années 80 ces soupçons d'idéologie sulfureuse collaient encore à la formation et m'avait un peu refroidi et détourné - provisoirement - du groupe (bizarrement on peut faire le rapprochement avec les accusations portées contre Blue Oyster Cult à la même époque et pour des motifs souvent similaires).

L'auteur, guitariste, mais aussi maître de conférences à l'université de Bourgogne, spécialisé dans le rock et notamment dans la création insiste de fait beaucoup sur l'aspect technique, la description des œuvres et le processus de composition et c'est là sans doute l'intérêt majeur de l'ouvrage que de montrer comment un tel groupe compose (essentiellement Vander même si d'autres musiciens ont apporté leur pierre à l'édifice), comment les morceaux prennent forme et comment les nouveaux titres sont joués pendant des mois voire des années en concert, dans différentes versions, avant d'être enregistrés (ou pas) en studio, une fois jugé définitivement aboutis par Vander.
Dans un registre similaire l'auteur aborde une autre particularité de Magma à savoir le fait que certains morceaux peuvent être abandonnés plusieurs décennies durant avant d'être enregistrés en studio. L'album "K.A", paru en 2002, est à la base une composition datant de la première partie des années 70, laissée de côté puisqu' étant jugée non satisfaisante puis reprise, améliorée et finalement réenregistrée dans une nouvelle version !
Pour corser le tout Magma incorpore également parfois des morceaux ou des passages existants déjà en tant que tels et ayant déjà été enregistrés en studio dans de nouveaux titres...
L'exigence de Vander dans ce long processus créatif est bien sûr analysée, décryptée et décortiquée avec minutie par Philippe Gonin.
Juste dommage que la création et le rôle du label Seventh records soient abordés un peu rapidement.

"Magma : décryptage d'un mythe et d'une musique" est assurément un ouvrage indispensable sur l'un des groupes les plus fascinants de la galaxie jazz / rock.
Et si l'auteur est fan du groupe il n'en oublie pas de garder de son esprit critique et une certaine objectivité.
(Encore un excellent bouquin paru aux Éditions "Le mot et le reste" dont il convient de saluer le travail remarquable effectué dans le domaine des ouvrages liés à la musique et notamment au rock). 

mardi 16 avril 2019

Magma : Mekanïk Destruktïw Kommandöh (1973)




Magma est un groupe français formé à la fin des années 60 par le batteur Christian Vander. Groupe de scène principalement et à géométrie variable. Magma joue une musique influencé par le jazz (John Coltrane en priorité), la musique classique (Carl Orff) et le chant choral. Leur musique est un mélange de rock progressif, de jazz-rock appelé Zeuhl. Le groupe chante en Kobaien, un langage inventé.

En 1973, Magma sort MDK son troisième album studio. Mais le morceau qui donne son titre à l'album (et qui dure toute la durée du disque) a été joué pour la première fois en 1971 à Bruxelles. Cette version est disponible sur l'album Concert 71 : Bruxelles, théâtre 140. Une version condensé de seulement 6 minutes avait été gravé quelques mois auparavant pour une compilation mais elle n'a rien a voir avec cette version de Bruxelles. Et même cette version ne dure qu'un peu plus de 17 minutes alors que la version définitive dure autour des 40 minutes. D'ailleurs a cette époque le morceau s'appelle encore Mekanik Kommandoh. Cette version est joué avec la formation des deux premiers albums.

D'autres version sont disponibles comme une version d'à peine plus de 5 minute parus sur l'album "Simple". Mais la version la plus intéressante hormis celle qui nous intéresse date aussi de 1973. Enregistré en janvier et durant aussi a peu près 40 minutes, elle est la dernière version avant celle de l'album. Le line up diffère un peu, on n'y trouve pas de guitare, pas de saxophone et certains musiciens partiront entre les deux versions.

Avant de nous intéresser à l'album, on doit deja savoir ce qu'est MDK. Mekanik Destruktiw Kommandoh est le troisième et dernier  mouvement d'une trilogie appelé Theusz Hamtaahk qui comprend aussi la pièce qui donne son nom à la trilogie et qui commence la trilogie et Wurdah Itah le deuxième volet. MDK même s'il est le dernier mouvement de la trilogie est le premier a voir été enregistré en studio, Theusz Hamtaahk n'existe pas à ce jour en version studio mais uniquement en Live. Et Wurdah Itah existe dans une version studio dépouillé utilisé comme musique d'un film et enregistré juste après MDK.

La trilogie raconte une histoire globale, mais si on n'a pas écouté le reste on comprend quand même. De toute façon vu que c'est chanté dans une langue qui n'existe pas, on ne comprend rien la plupart du temps.

Vander raconte que MDK fut le dernier opus de la trilogie qu'il a commencé mais alors que les deux autres mouvements étaient composés également, il a enregistré MDK en premier. Il avoue aussi que pour lui c'est la vraie naissance de Magma (ce n'est pas pour rien qu'il a réenregistré il y a quelques années, Riah Sahiltaahk, tiré du deuxième album du groupe pour lequel il ne s'estimait pas satisfait de l'arrangement de l'époque, jamais il n'a retouché a MDK). 


Il a trouvé des musiciens (il faut savoir que lister tous les musiciens de Magma depuis les débuts prendrait des heures, voire peut-être même des jours tant ils furent nombreux) ayant le même état d'esprit que lui. C'est d'ailleurs sur cet album qu' arrive celui qui sera pendant une partie de la décennie, le deuxième membre le plus important du groupe, le bassiste Jannick Top. De formation classique, il va devenir compositeur des morceaux du groupe avec Vander, allant d'aller poursuivre un carrière entre le jazz et la variété et le rock français (accompagnateur de tous les grands noms de la scène française des années 80 : Berger, Johnny, Higelin, Chedid....). L'album a été enregistré enregistré et marque la première collaboration du groupe avec le producteur Giorgio Gomelsky

Le morceau qui compose l'album est découpé en 7 pistes sur le disque mais doit être écouté dans sa globalité en une seule fois. Décrire la musique de Magma est difficile, tout comme entrer dans l'univers du groupe. C'est une expérience sonore à faire une fois dans sa vie.