
Nous sommes en 1977 et,
menée par une bande de faux frères New Yorkais, une horde de musiciens amateurs
lancent leurs glaviots minimalistes sur le cadavre du mouvement hippie.
La révolte fut en réalité
initiée dès la fin des sixties, avec les cris rageurs d’Iggy Pop , et la poésie
nihiliste du Velvet Underground. Fustigeant l’immobilisme d’une musique qui
trainait ses vieilles légendes comme des boulets, le punk est progressivement
tombé dans une autre impasse.
Sa philosophie incitait
les groupes à se saborder après quelques mois. La plupart n’avait même pas le
temps de laisser une trace de leur passage. Le punk était une étoile filante
au milieu d’un champ de ruine, et on essaie aujourd’hui de reconstituer son
fulgurant parcours.
Les saints sont sans doute
une des parties les plus lumineuses de cet héritage oublié. Respectant à la
lettre l’esthétique « do it yourself » , ils produisirent eux mêmes leur premier single. Nous sommes à l’apogée du punk et de la power pop et, si
il n’a pas fait de vague dans les charts , le 45 tours attire rapidement l’intérêt
d’un label. Sire record s’empresse donc de signer le groupe, et de promouvoir
son disque aux Etat Unis.
La firme est bien
consciente qu’une déflagration pareille risque de ne pas durer, et elle doit
elle aussi en profiter. L’album « I’m stranged » sort donc en 1977,
quelques mois avant nevermind the bollocks.
On peut logiquement se
demander ce que le punk serait devenu si, à sa sortie, I’m stranded avait été
aussi célébré que son petit frère anglais. Rugueux est corrosif, une bonne part
de ce disque ramène l’auditeur à l’époque où les stooges balançait un rock plus
bruyant que toutes les usines de Detroit.
Les saints étaient des
gladiateurs chargés de mettre l’Amérique face à cette énergie d’une violence inouïe,
que les stooges domptèrent au péril de leur vie. Guerriers de la routes, ces
australiens n’hésitent pas à croiser le fer avec les riffs déchirants des
frères Asheton.
« Erotic neurotic »
et « I wanna Be your dog » sont aussi synonyme que « Come
together » et « you can’t catch me » , ce sont les puissants échos
d’une énergie abrasive. La production très crue fait tout pour accentuer cette
proximité, et nous transporte dans la genèse du son de Détroit.
Heureusement,
contrairement au groupe d’Iggy, les saints ne feront pas l’erreur de ralentir
le rythme à mi parcours. Ils parviennent au contraire à insuffler un peu de
finesse à ce brasier électrique.
Story of love et missin
with the kid sont dotés d’une douceur punk pop qui annonce les jams , plusieurs
mois avant la sortie d’in the city . One way street, lui, place le groupe dans
le sillon du punk new yorkais, ses riffs speedés flirtant avec le son des
Ramones.
Après ça, le punk pouvait
déjà mourir. Suite à la sortie de « nevermind the bollocks » , la critique
ne verra « i ‘m stranded » que comme un autre écho de la verve
du groupe de Johnny Rotten.
En fin de compte, le
mouvement Punk n’est pas mort assez tôt pour rendre justice à ses plus grands héros.
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