(par Benjamin Bailleux)
Si un élément a bien changé la vision de l’album, c’est
la modernisation des studios d’enregistrements dans les sixties. Icône de ce changement,
les Beatles se sont rués sur ces nouveaux jouets comme des affamés, demandant à
leur producteur de mettre en place toute une série de dispositifs ingénieux, pouvant
les amener à immortaliser les sons incroyables sortis de leurs grandioses
inventivités.
« Je veux chanter comme un boudhiste psalmodiant du haut de la plus haute des montagne » dit Lennon. L’ingénieur du son cogite, déplace ses micros afin d’obtenir l’écho demandé, et voila que les Beatles font naitre "Tomorrow never knows" .
De l’autre coté de l’atlantique, les Beach Boys ont plutôt
misé sur des cœurs luxuriants, une première pulsation de batterie devenue culte,
et divers bruitages pop en produisant Pet Sound. Plus discrètement,
Zappa n’a cessé de se servir des possibilités offertes par les studios d’enregistrement,
donnant ainsi une ambiance particulière à ses œuvres, en collant certains
enregistrements au milieu d’autres.
Freak out, Revolver, Sgt Pepper, Pet Sound, tous ces disques sont autant de chefs d’œuvres
produits grâce aux bricolages géniaux de véritables savant fous des studios d’enregistrements.
Quand The Move entre en studio, pour enregistrer son
premier album, ces disques sont déjà sortis, et leurs auteurs sont, pour la
plupart, devenus riches et célèbres. Il
faut dire que, à ses début en 1966, le groupe était bien loin de s’insérer dans
le rang de la pop savante pour « rocker mature ».
Encouragé par un manager qui a sans doute inspiré Malcolm
Mclaren, The Move creuse le sillon du Rythm 'n Blues destructeur représenté par
les Who. Comme le groupe de Pete Towshend à ses débuts, The Move arrive sur
scène dans des tenues soignées, apte à séduire les jeunes Mods, avant d’incendier
les salles dans lesquelles il joue. Il n’est pas rare qu’après une de leurs
prestations, les pompiers soient appelés pour éteindre les incendies provoqués par
ce groupe sulfureux.
Et puis les pyromanes signent chez Decca, entrent en
studio, et enregistrent des singles où brille leur amour pour les Beatles et les
Kinks. Excentrique, énergique , et furieusement pop, The Move devient vite une
grosse machine à tubes
Le succès des singles dans les Hit parades anglais permet
à The Move de partager l’affiche avec Soft Machine, Pink Floyd et les Pretty Things lors du mythique festival 14 hour technicolor dream. Et puis vient le
moment d’entrer en studio, pour enregistrer un premier album très attendu. Là
, The Move calme son agressivité, pour laisser libre cours à son
inventivité.
The Move sort en 1968, et c’est un succès
immédiat. Fortement marqué par le psychédélisme, le disque est un bazar génial,
où le groupe multiplie les expérimentations et autres tours de passe-passe.
Cœurs enjoués, délires néoclassiques , refrains tendrement
acides, arrangements minutieux, ce premier album, c’est le rock Anglais dans
toute sa grandiose extravagance. Chaque titre est un tube en puissance, tout
en contenant une originalité expérimentale que n’aurait pas renié les Beatles
et les Kinks à leurs meilleurs heures.
On ne peut que regretter que le groupe n’ait pas réussit à se stabiliser, multipliant les changements d’effectif, avant de partir dans un
progressif rock boursouflé sous la houlette de Jeff Lynne. Le génie frappe
rarement deux fois, et ce disque en est la preuve éclatante.
The Move à (re)découvrir sur Spotify.
The Move à (re)découvrir sur Spotify.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire