(par Benjamin Bailleux).
Au milieu de ses glorieuses sixties, le blues est encore
au centre de la musique anglaise. En reprenant les glorieux gimmick des
bluesmen américains, les anglais construisent leur mythologie musicale faite de
héros puristes.
Les Stones sont au sommet et , après le grandiose
"Satisfaction" , ils sortent enfin leur premier album entièrement composé de
chansons originales, Aftermath. Si le multi instrumentiste Brian
Jones apporte une bonne touche d’originalité, l’influence du blues reste
palpable dans le feeling inimitable de Keith Richard.
A la même époque, les Bluesbreakers sortent un disque qui
révolutionne le blues. Paru la même année que l’album des Stones, John
Mayall and the bluesbreaker with Eric Clapton » fait naitre le culte du Guitar-Hero.
Eric Clapton est largement mis en avant, sa guitare n’est
plus un simple instrument d’accompagnement, mais un instrument sacralisé, capable
de s’embarquer dans de brillantes divagations solitaires. Cette vision trouvera
un glorieux écho sur le premier album de Jimi Hendrix, et sera à le point de
départ d’un cheminement qui mènera à la naissance du hard rock.
Le blues semblait donc, des 1966, partir dans deux
directions. La première, remarquée sur certains disque des Stones ou de Cream,
le voyait fricoter avec les riffs distordus du psychédélisme, alors que le
second visait simplement à le jouer plus fort et plus violemment.
Le Edgard Brouton Blues Band commencera par jouer un
blues puriste, qui lui permet de ce constituer un publique dans sa ville natale
de Warwick. Il est vite attiré par Londres, devenu l'un des centres névralgiques
du Rock après la glorieuse ascension des Beatles.
Il monte donc dans la capitale, et découvre une ville qui,
à l’image de San Francisco, vit au rythme des mélodies Psychédéliques. Le groupe
raccourcit donc son nom, pour devenir le Edgard Brouton Band, avant d’être
repéré par Blackhill Enterprise.
Fondé par les membres de Pink Floyd, la société leur
permet de signer rapidement un contrat d’enregistrement, et de sortir un
premier 45 tour à mis chemin entre l’Acid Rock crasseux de Blue Cheers et le
proto punk des Stooges. Mais surtout, le label laisse une liberté total à ses
musiciens, qui développe alors un blues acide, déjanté et expérimental.
Sortie en 1969, Wasa Wasa est un album qui
ne pouvait naitre qu’à cette époque dingue, où les maisons de disques ce
contentaient de vendre une musique qu’elle ne comprenait pas toujours. Pour avoir
une idée de la folie de ce Wasa Wasa, il faut imaginer Beefheart
et son Magic Band en train de réadapter le MC5 un soir de défonce.
La voix d’Edgard Brouthon est d’ailleurs assez proche de
ce chant blues et Dadaïste, qui fait la grandeur du capitaine cœur de bœuf. Derrière
lui, le groupe joue un blues trempés dans l’acide, déstructuré par les délires
improvisés de compositions qui semblent naitre sous nos yeux.
L’Edgard Brouton Band sortira ensuite un disque mieux
maitrisés musicalement, mais il perdra ce sentiment d’urgence qui fait la
grandeur de ce Wasa Wasa. Wasa Wasa, c’est le psychédélisme et le blues qui explosent dans un chaos proto Hard-Rock, une
orgie sonore jouissive et enjouée que n’auraient pas reniés Zappa et Beefheart, un
monument à la gloire d’un underground anglais inventif et décomplexé.
Par la suite, le groupe va progressivement s’assagir,
remplaçant son Acid Rock déjanté par un Hard-Rock vaguement Country.
Progressivement tombé dans l’oubli, il finit par disparaitre des radars en
1982, sortant parfois quelques Lives qui passent inaperçus.
Réédité une seul fois en vinyle, Wasa Wasa est enfin accessible
à tous grâce à la magie de Youtube.
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