Le rock aurait-il été aussi grandiose sans le LSD ?
Bien que je ne sois pas fan des théories de Huxley , qui
voyait la substance comme un moyen « d’atteindre un nouveau niveau de
conscience » , force est de constater que les visions provoquées par la pilule
de ce bon vieux Timothy Leary ouvrit des perspectives extraordinaires. Développée
par la CIA , qui cherchait un moyen de mieux contrôler les masses , elle fait aussi du psychédélisme un
magnifique pied de nez envoyé au pays de l’oncle Sam.
De sergent pepper à surrélalistic pillow , de Ummaguma
aux premiers deviants , le rock psychédélique fut bel et bien cette substance
apte à ouvrir les esprits. Huxley s’était donc trompé sur un point, la
substance n’était pas une fin mais un moyen, et un idiot ne deviendra pas un
génie en consommant quelques pilules psychotropes.
En revanche, cette drogue entrait dans une époque de libération,
où quelques groupes se mirent à donner des concerts gratuits. Les pink fairies se
firent connaitre ainsi , en jouant devant les grands festivals, pour militer
contre la prise de pouvoir de l’ogre capitaliste sur cette belle machine à
faire rêver qu’est la pop.
Hawkwind partageait la même vision libertaire de la musique,
et jouait surtout « pour le peuple » , comme le disait si bien Dave
Brock. Il y eut d’abord une période de construction, où le groupe réussit tout
de même à se faire remarquer par Hendrix , avant de faire la rencontre d'une figure
incontournable dans sa légende.
Lemmy , doit son nom à sa manie d’emprunter sans cesse de
l’argent aux musiciens qu’il fréquente. Quand il entre dans le groupe, peu de
temps avant l’enregistrement de ce disque, son jeu brutal entraine vite les
autres musiciens vers un son plus musclé.
Sorti en 1969 , in search of space est LE disque qui va définir le space rock , juste
avant que pink floyd ne rejoigne ces univers cosmiques sur ummagumma . A l’arrière
de la pochette, une déclaration délirante annonce la grandeur du voyage
entrepris par l’auditeur imprudent : « Techicians of spaceship earth
this is your captain speaking your captain is dead ».
Voilà qui résume bien notre sentiment lorsque l’on entre
dans l’épopée spatiale qui ouvre le disque. Long de 15 minutes, You shouldn’t do
that démarre sur une mélodie synthétique et cotonneuse, qui laisse monter un
menaçant riff répétitif, vaisseau tonitruant perçant le mur du son dans un décor
étoilé.
Car Hawkwind maitrisait déjà cet art de larguer des
bombes rythmiques déballées sur un tempo hypnotique , une technique dont ses
enfants stoner ne garderont que la bruyante simplicité. Ils oublieront la folk
martienne de « we took the wrong step years ago » , sorte de version
futuriste de space oddity, ils ne chercheront plus la clef de ces sons
électroniques fascinant, qui feraient baver les virtuoses de l’electro allemande.
En un mot, cet univers ne sera plus jamais exploré.
Dès le premier disque,
Hakwind avait déjà atteint le sommet de son univers spatial, il n’en redescendra
qu’après avoir produit une poignée de disques fulgurants. Sur scène, le groupe
effectuera de véritables cérémonies païennes , une danseuse plantureuse
effectuant ces rites mystiques devant un public abasourdi. Les sixties
sonnèrent l’avènement de l’œuvre total, et hawkwind sera un de ses plus
brillants représentants. In search of
space n’est pas une œuvre qu’on écoute distraitement d’une oreille pour passer
le temps, il faut faire l’effort de s’immerger dedans.
D’ailleurs, pour mieux ressentir les effets de cette
machine à orgone musical , on conseillera à l’auditeur de mettre le volume au
maximum , et de laisser cette substance faire décoller son esprit , aucune
résistance ne sera admise.
En cette année 1969, des milliers d’esprits décollaient
vers la planète Hawkwind , découvrant la grandeur de ses décors spatiaux , et la beauté de ses mélodies , qui restent progressistes sans s’approcher du côté
pompeux d’un King Crimson ou d’un Pink Floyd.
In search of space offrait ainsi une nouvelle vision du fameux opium du peuple,
le sien ouvrant son esprit au lieu de l’enfermer dans l’ennui d’une société
consumériste.
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