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samedi 28 septembre 2019

John Cougar Mellencamp : Sad Clown and hibbilies


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On a toujours vu Mellenchamp comme le Springsteen du pauvre. Il faut dire que l’homme n’arrive dans le paysage musical qu’en 1975 , alors que Petty et Springsteen sont en pleine gloire. Affublé du titre de « future du rock », Bruce construit l’image de héros romantique qui fera sa renommée, alors que Mellechamp sort tous juste de sa campagne, et commence à attirer l’attention de Tonie De Frie.
                                                           
Le manager de Bowie lui permet de signer un contrat avec MCA , l’ex bucheron de l’Indianna se transformant ainsi en icône pop enchainant les singles. L’explosion vient soudainement, quand Pat Benatar reprend « I need a lover » , donnant à Mellenchamp l’image d’un chanteur pop proche de Tom Petty , qui est alors sur le point de sortir damn the torpedoes.

C’est ce son folk mais entêtant, traditionnel mais poli, qui fera le succès d’album comme Lonesome Jubilee , scarecrow , et plus tard le génial whenever we wanted. Nous étions alors fin 70 début 80 , et les productions commençaient à se standardiser , tout en permettant à des artistes aussi divers que Petty , Mellenchamp ou Fleetwood Mac d’affirmer une personnalité très forte.

Ce n’était plus Dylan passant de l’acoutique à l’électrique, avant de réinventer la country pour soutenir ses images bibliques, la production devait être propre et moderne. Mais on pouvait encore trouver dans cette modernité une diversité et une inventivité qui régalaient les auditeurs les plus attentifs. Les autres se sont contentés de la forme, mettant John Cougar dans le même panier que Petty, et le condamnant ainsi au second rôle sur la scène folk rock.

 Derrière la production policée, on trouvait sur lonesome jubilee des notes de banjos et violons sentant bon le bluegrass terreux.

Mellenchamp était en réalité un représentant de l’Americana, style revendiquant l’influence des grandes traditions musicales américaines, pour lutter contre la standardisation enclenchée dans la pop. Fils de Dylan, il dirigera sa plume contre Reagan, et affirmera sa compassion pour ces travailleurs de la terre qu’il connait bien (notamment sur scarecrow).  L’homme, contrairement à Petty , n’était pas là pour célébrer l’amour et la légèreté de son temps , mais plutôt pour dénoncer la fin de l’américan dream , et réclamer un retour à une musique plus significative.

Dans ce cadre, American Jubilee et scarecrow resteront ses disques les plus inoubliables, même si le chanteur se laissait aller à quelques compromis avec son époque.  Aujourd’hui, les modes musicales ont disparu, le déclin de l’industrie ayant paradoxalement laissé une plus grande liberté aux artistes déjà établis.
                                                      
Sans cet effondrement, je ne sais pas si Johnny Cash aurait produit sa dernière série d’albums de la même façon. Et ce même si les années 90 cherchaient encore une nouvelle poule aux œufs d’or, les maisons de disques voyaient déjà l’iceberg s’approcher.

Mellenchamp suivra son exemple en 1999, en sortant le très  roots rought harvest , et en transformant le tube « love and happiness » en chant de campagnards. Il reprendra ces sonorités bluegrass en 2014 , son live at town hall étant encore meilleur que le live in dublin de Springsteen , qui exprimait les mêmes influences rustiques.

Sorti en 2017 , sad clown and hibbilie reprend les choses là où rought harvest les avaient laissées. Et c’est encore le vrai Mellenchamp qui apparait à travers ses mélodies Steinbeckiennes , les larmoiements de violons rappelant l’histoire tragique de milliers d’américains lancés sur les routes lors de la grande dépression.

Pour ce nouveau retour à la terre, John s’est entouré de Carlène Carter , fille de June , dont les chants bercèrent la jeunesse d’un certain Johnny Cash, avant qu’il ne l’épouse. Elle lui offre « indigo sunset » , douce ballade country que n’aurait pas renié ses illustres parents. La voix de Carlène se marie parfaitement avec celle de Mellenchamp, le disque ressemblant parfois à une revue d’artistes itinérants, alors qu’on verrait bien Tom Joad déclamer les vers des ballades les plus poignantes.

Même quand il revient à un son plus électrique, renouant avec le rock via le riff presque stonien de Grandview, ce rock-là a la patine des grands titres de Chuck Berry. Puis vient l’harmonica qui ramène cette rythmique urbaine dans les champs du sud-américain.

Puis le rocker se fait de nouveau barde , narrant une nouvelle histoire de petites gens, qui fait encore briller la voix de sa chanteuse. Requiem for the american dream , voilà comment aurait pu s’appeler ce disque , l’affection de Mellenchamp pour l’Amérique des travailleurs suintant à chaque note. La folk comme la country est la musique du peuple, et celle des grands espaces qu’il met si bien en musique sur « mobile blues ».

Le titre était au départ un vieux blues, qui ressemble ici à une chevauchée au milieu du far west , les décors des grands films de Peckinpah se rappellent alors à nous.

 Et c’est peut-être pour ça que l’histoire a moins retenu Mellenchamp que ses illustres contemporains, ses influences poussiéreuses et sa verve Dylannienne étaient à des années lumières des tendances de son époque.    

Aujourd’hui , on ne peut que s’en réjouir , tant « sad clown and hibillies » est un disque classieux et envoûtant.




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