Nous sommes en 1975, lessivé par l’exploit que constitue « dark
side of the moon », le floyd cherche un second souffle. L’idée viendra encore de Waters, qui souhaite
articuler le nouvel album autour de shine on you crazy diamond, son long poème,
sur lequel Gilmour a plaqué son riff stellaire. « wish you were here »
sera donc un disque sur l’absence, emballé par une pochette culte signée
hignosis.
Alors qu’ils sont en plein travail au studio abbey road ,
les musiciens reçoivent la visite d’un homme chauve et bedonnant , qui attire
leur attention sans qu’ils comprennent immédiatement pourquoi. C’est Roger
Waters qui le reconnaîtra le premier, fondant en larmes lorsqu’il comprit que ce
qu’il avait devant lui était le corps, et l’esprit, d’un Syd Barrett arrivé au
terme de sa déchéance.
Bien que présent sur une courte période, Barett a
toujours guidé la musique du floyd , une série d’images honorant la mémoire de
ce génie détruit. Après avoir été «
le fou dans l’herbe » de dark side of the moon » , le voilà
transformé en diamant fou , symbole de l’insouciance perdue.
Wish you were here est un disque nostalgique, qui délivre
un message universel à partir de l’histoire tragique de son ex leader. Quand,
en introduction de shine on , Gilmour chante « remember when you were
young , you shine like the sun » , il semble dresser un miroir à travers
lequel chacun peut projeter son propre âge d’or. Sa guitare, lyre céleste
lançant des homélies mélodiques, devient alors le réceptacle de toutes les
joies perdues.
Cette fresque emmène l’auditeur vers des sommets réconfortant,
chaque étape du titre s’apparentant au décompte sensé envoyer notre esprit sur
orbite. Le clavier prend d’abord le temps de poser le décor, ses ambiances
entourent l’auditeur comme une épais nuage blanc. Arrivent ensuite les quatre notes célestes de Gilmour, grand requiem annonçant l’évocation de Syd Barett.
Un long instrumental laisse ensuite l’esprit de l’auditeur calquer ses propres
souvenirs sur sa mélodie, le chant arrive alors comme une apothéose spirituelle,
bientôt clôturé par un saxophone majestueux.
Quelques minutes plus tard, le Floyd semble quitter
Barett, pour laisser Roger Waters déverser son fiel contre l’industrie du
disque. Mais, si le blues robotique de « welcome to the machine » est
si violent envers ce musique business qui vient juste de rendre le floyd riche
, c’est parce qu’il pense que la pression qu’il impose a poussé son ex leader
vers la folie. Sur le même thème, « have a cigar » part dans un
registre plus léger, Roy Harper balançant son funk irrésistible en haut du
nuage délirant que tisse le Floyd.
C’est que le titre n’est qu’une petite récréation avant
le véritable chef d’œuvre du disque, son merveilleux morceau titre. Il permet à
Waters d’exprimer une nouvelle fois ses troubles, cette confrontation entre son « mauvais
côté » arriviste, et son coté altruiste « lumineux », pour en
arriver à la conclusion que le premier l’emporte le plus souvent sur le second.
Encore une fois, la musique n’impose pas cette interprétation. L’auditeur est
libre, lorsque gilmour chante
«How I wish, how I
wish you were here
We're just two lost souls
Swimming in a fish bowl
Year after year »
We're just two lost souls
Swimming in a fish bowl
Year after year »
de calquer sur son texte le visage de celui qui a
emporté avec lui une époque merveilleuse, qui ne reviendra plus. Country cosmique,
le titre célèbre encore une fois le feeling majestueux de Gilmour , dont le
riff acoustique débouche sur un solo hypnotique , la tradition country
cohabitant avec la rêverie psychédélique dans une mélodie sortie de l’éden.
Après cette apothéose, la seconde partie de Shine on you
crazy diamond clos le bal sur un riff strident, ouvrant la voie à un solo
rageur. C’est un véritable cri de
révolte face au cynisme du destin, qui est parfaitement résumé à travers le
message d’espoir que dispense Roger Waters « Et nous nous réjouirons dans l’ombre
du triomphe d’hier ». En écrivant un grand hommage à celui qui continue de
marquer son histoire (Barett), Le floyd a produit une des plus belles odes à l’espoir
de la musique pop.
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