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vendredi 16 novembre 2018

[CHRONIQUE] Love - Forever Changes (1967)

(par Benjamin Bailleux).


Habitant Los Angeles depuis l’âge de 8 ans , Arthur Lee commence à enregistrer dès 1963. A une époque où le rock est en pleine mutation, il enchaine les groupes obscurs et laisse derrière lui une poignée de disques vites oubliés. Ces nombreux changement de groupes l’amèneront, en 1964, à croiser la route d’un Jimi Hendrix encore inconnu. Cette entrevue légendaire donna lieu à l’enregistrement d’un single vite oublié, Arthur Lee cherche encore sa voie.
Il l’a trouvera en assistant à un concert des Byrds. Le groupe vient alors de sortir un premier album révolutionnaire et, fasciné par ce qu’il entend, Arthur Lee décide que son groupe jouera une fusion entre le Folk-Rock des Byrds, et le Rythm n'blues primaire qu’il aime tant. Il forme donc Love, et obtient rapidement une bonne audience dans les clubs de Los Angeles. Avec leurs premiers cachets, les musiciens achètent une maison ayant appartenu à Bella Lugosi et mènent une existence communautaire.

Le premier album du groupe sort en 1966, et obtient des ventes encourageantes. Il faut dire que Love était encore très proche du Folk-Rock des Byrds qui trustait déjà le sommet des charts.
Ce n’est qu’en 1967, avec son second album, Da Capo, que Love va réellement poser les bases du mélange enivrant qui aboutira à la sortie de ce Forever Changes. Encore critiqué pour un son trop épuré, qui ne convenait pas à la sophistication de ses compositions, Da Capo ne faisait qu’annoncer les merveilles à venir.

Commencé quelques semaines après la sortie de Da Capo, l’enregistrement de Forever Changes démarre de façon chaotique. Alors qu’il est sensé produire l’album, Neil Young abandonne avant les premières séances d’enregistrement. Pour le remplacer, Love appelle en urgence Bruce Botnick, un jeune ingénieur du son, qui gagnera ses galons en participant aux enregistrement des Doors. Pour souligner la beauté des mélodies inventées par Arthur Lee, Botnick à l’idée d’engager des musiciens de sessions en plus du groupe. Cette idée ajoute une pression supplémentaire à Love, qui abandonne le travail après deux morceaux. Conscient qu’ils partent dans une mauvaise direction, les musiciens se remettent à répéter, jusqu'à trouver la formule parfaite.

Regonflé par cette remise en question, Love finit par reprendre les séances, et enregistre le reste de l’album en quelques heures. Le stress engendré par ce début d’enregistrement chaotique inspirera à Arthur Lee les vers doux amères de "The red telephone" :




"Sitting on a hillside
Watching all the people die
I'll feel much better on the other side."
("Assis sur un flanc de coteau
En regardant tous les gens mourir
Je me sens beaucoup mieux de l'autre côté.")



Même Dylan n’y aurait pas pensé ! Il faut dire que le compositeur est chamboulé par le succès des Doors, qu’il vit comme une humiliation. Alors que c’est lui qui, quelques mois plus tôt, avait conseillé au label Electra de s’intéresser au groupe de Jim Morrison, les Doors atteignent les sommets dès le premiers album.
Après des début difficile, l’album des Doors fait en effet partie des meilleurs vente de cet année 1967, alors que Love doit ce contenter d’un succès d’estime. Profondément blessé par ce coup du sort, Arthur Lee pense que sa fin est proche, et que Forever Changes sera son testament musical.

Déprimé, le compositeur invente des mélodies riches et sombres, merveilleuses et oppressantes. Sur fond de cuivres  hypnotiques, la voie du chanteur récite des plainte nostalgiques. Même les titres les plus enjoués, comme "Love Maybe The people Would Be The Times Or Between Clark And Hilldale" et son rythme entrainant, semble empreint d’une certaine tristesse.    
Et c’est cette dualité qui fait le charme de cet album sombre, et pourtant d’une grande beauté.

Mais, peu après sa sortie, le groupe subit les conséquences de ses excès. Ravagé par l’héroïne et autres substance, les musiciens abandonnent la partie, découragés par les faibles ventes de l’album.
Love se reformera par la suite, sans réussir à renouer avec la grâce de ce Forever Changes, qui n’obtiendra le statut de chef d’œuvre que des années après sa sortie.

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