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dimanche 8 septembre 2019

Gov't Mule : Dark Side Of The Mule


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Lorsque ce live est sorti, en 2014 , les puristes ont du se demander ce qui était arrivé à gov’t mule. Certes , le groupe a toujours pris un malin plaisir à parer le blues sudiste de ses dorures mélodiques. Les premiers albums annonçaient donc la renaissance de ce rock rugueux, qui se parait désormais de sonorités plus complexes, d’un son au pouvoir de séduction moins immédiat.

Les trois premiers disques gardaient pourtant une puissance groovy propre aux enfants de Lynyrd , tout en laissant deviner une virtuosité qui ne demandait qu’à s’épanouir dans des univers plus larges. Un compromis entre la rugosité de leur Amérique profonde et la puissance mélodique des plus grands groupes anglais, voilà ce que représentait la mule. Mais de là à crier son amour d’un symbole de la pop élitiste il y’avait une marge.

Nous voilà donc, encore une fois face à cette vieille peur : les messies que les rockers avaient choisis étaient-ils en train de nous faire leur aveu d’impuissance. On en a vu tant s’étioler dans le bain visqueux du passéisme putride, que la peur nous serre le cœur à chaque reprise, et le moindre hommage est fatalement déclencheur de soupçon. Le rock est comme l’homme, s’il ne bouge pas il s’affaisse, perd toute puissance de séduction, et finit par ne susciter que dégout et rejet.

Voilà pourquoi les jeunes préfèrent le rap au rock. Certes le rap est con, mais il s’agit d’une connerie variée, foisonnante, aussi inépuisable que celle qui qualifie une bonne part de l’espèce humaine.  

Alors, pour dissiper toutes ses peurs , la mule lâche les chevaux dans une ouverture où il dynamite ses classiques. Les solos ravageurs de Warren Hayne renouent alors avec la puissance des débuts, pendant que les claviers nous préparent en douceur à la prestation d’un groupe, qui ne cessera de troquer la naïveté de ses premiers cris contre une nouvelle forme de beauté musicale. Une approche en douceur du « coté sombre de la lune », voilà ce que représente la première partie de ce concert, le gang de l’ex Allman produisant un boucan digne d’une fusée en plein décollage, pour rassurer ses passagers sur les capacités de l’appareil dans lequel il embarque.

On commence à entrevoir les décors lunaires grâce à un instrumental fiévreux , ou eternity breath est transformé en groove spatial , avant de laisser place à une version dépouillée du fameux riff de St Stephen. Avec une rare intelligence, gov’t mule parvient à s’approprier l’ambiance fascinante d’eternity breath , St Stephen enchainant sur une énergie beaucoup plus directe. Comme si le groupe dessinait sa propre dualité à travers ce passage majestueux.

Le premier décollage a eu lieu, mais il est rapidement suivi d’une dernière escale sur terre, le temps de refaire parler la poudre. Et puis le groove change progressivement de forme, la mélodie passe lentement devant la puissance électrique, comme si la brute avait laissé place au poète.

C’est que gov’t mule a muri depuis le départ tragique de son premier bassiste , et ce live commence à ressembler à une victoire du groupe dans son long combat vers la maturité. J’avoue pour ma part apprécier autant la première période que la seconde, et je ne suis visiblement pas le seul à apprécier que gov’t mule puisse faire autre chose que du blues tueur de tympans.

La preuve, lorsque Warren Hayne annonce un set « vraiment spécial » , et que les premières notes de child of the earth résonnent , le silence se fait et une autre magie commence à faire effet. Vient ensuite « shine on you crazy diamond » , qui nous permet de saluer l’humilité d’un guitariste qui n’a pas cherché à singer la beauté atmosphérique du jeu de David Gilmour.

A la place, il fait entrer le groupe dans un jazz cotoneux et éblouissant, le prodige spirituel naissant de l’alliance de ces musiciens plus attachés  à leurs buts qu’à leur égo.  C’est encore une nouvelle spiritualité qui semble ressortir de ce moment merveilleux, où le public uni comme un seul homme déclame les fameux vers de wish you were here. Cette ballade dédiée au génie perturbé que fut Syd Barett devient alors un hymne universel, la perte de ce grand homme résonnant dans chaque cœur d’une façon différente, mais avec la même force. Si il y’a une force supérieure, elle se situe dans ces refrains , qui nous attirent pour mieux nous élever. La musique ayant réussi à produire des moments de communions que la religion ne peut que singer gauchement.  

Et ses classiques, que le public a choisi de s’approprier, gov’t mule les encre entre ses compositions, comme si ils étaient issus du même moule. Il fait ainsi plus que rendre hommage à un monument qui brillera toujours tel un diamand fou , il justifie un virage élitiste que beaucoup semblait lui reprocher depuis la sortie de « déjà voodoo ».

L’élève est allé chercher auprès du maitre la matière capable de justifier sa nouvelle existence, et les deux parties se sont régénérées à travers cet échange plein d’humilité.     


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