Rubriques

lundi 19 juillet 2021

Neil Young : Old Ways

 


Banane et costume rose, Neil Young est devenu un musicien rockabilly plus vrai que nature. Alors que son groupe swingue comme le Elvis des débuts, Geffen interrompt l’enregistrement de son prochain album. Neil avait encore deux titres à mettre en boîte, mais sa maison de disque n’accepta pas qu’il se paie ouvertement sa tête. Après la sortie de Everybody’s rockin , disque qui n’a de valeur que grâce à la révolte qu’il représente , Geffen décide d’attaquer Neil en justice pour « non-respect du style Neil Young ». Parle-t-elle du Neil Young torturé et bluesy de Tonight the night ? Du Neil Young épanoui et country de Harvest ? A moins qu’elle ne préfère le rocker tonitruant de Rust never sleep.

Comme beaucoup d’artistes libres, Neil n’est pas stable, il existe presque autant de « style Neil Young » que d'albums du loner. Après sa maison de disque, c’est au tour de son public de ne plus comprendre ses soudains changements de styles. Nous sommes au milieu des années 80 et le public de la Nouvelle Orleans attend impatiemment son héros. Lorsqu’il arrive sur scène, Neil prend le micro avec la gravité d’un tribun montant à la tribune. Celui qui vomissait la politique de Nixon livra un discours maudissant le désarmement des Etats Unis, justifia le fiasco du Vietnam en affirmant que l’Amérique voulait juste « donner un coup de main », et finit sa diatribe sur un vibrant plaidoyer patriotique. Ce discours, au-delà de ce que l’on peut en penser sur le fond, montre que Neil Young est aussi libre politiquement qu’artistiquement.

Après cette prestation, il affirme à qui veut l’entendre qu’il abandonne le rock pour la country. On peut donc lire dans plusieurs journaux que le loner considère que la musique de Johnny Cash fut toujours sa véritable musique, son véritable style. En lisant ça, Geffen enrage. Si le loner affirme désormais que la country est son véritable style, qu’elle l’a toujours été et qu’il n’en déviera plus, le procès que lui a intenté la maison de disque devient absurde. Geffen se résigna donc et retira sa plainte.

C’est dans ce contexte que sort Old Ways, disque qui ne fait que confirmer la voie que Neil traça lors de ses dernières déclarations. Persécuté par son label, notre canadien a laissé sa old black au vestiaire pour creuser le sillon d’une country traditionaliste. Ne vous attendez pas à trouver ici un riff irrésistible à la Heart of gold ou une symphonie campagnarde aussi majestueuse que A man need a maid. Ces splendeurs sont des raffinements de citadin, et Neil ne veut plus s’éloigner de sa chère campagne. La rythmique de Old way est aussi nonchalente que celle des Tennessee tree, violons et pianos résonnent sur de douces berceuses campagnardes. Quand la guitare électrique entre dans la danse, elle ronronne comme un gros chat au soleil.

Old ways n’est pas un album révolutionnaire, encore moins un classique. Ses mélodies, plus rustiques et légères que celles d’un Mellenchamp , sont trop pures pour marquer durablement les esprits. On se laisse néanmoins facilement emporter par la douceur de the Wayward wind , l’énergie de Get back to the country nous régénère comme un week-end à la campagne. Contenant son lot de bons moments, Old ways est un exercice de style agréable.

Alors bien sûr , certains virent dans cette légèreté les signes du déclin à venir. Il n’allait en effet pas tarder. On évitera pour autant de classer ce Old ways parmi les album honteux du Canadien. Parcourir ces mélodie, c’est se promener dans un village dont on connait chaque mur, chaque paysage , et qui parvient pourtant toujours à nous émerveiller.

Non la country n’est pas « le style Neil Young » , elle n’en reste pas moins un élément essentiel de sa légende. Alors ne boudons pas notre plaisir lors de cette petite récréation, le pire est encore à venir et ce Old ways a au moins le mérite d’honorer une racine de son auteur.   

   

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire