En cette fin de sixties , un des plus grands groupes de
blues anglais est en pleine décomposition. Les yardbirds furent l’épicentre du
rock britannique, le volcan propageant les flammes ardentes d’un nouveau rock. C’est
là que commença la légende d’Eric Clapton , qui quitte le groupe quand celui ci tombe dans ses égarements pop. Jeff Beck prend alors le pouvoir , poussant le groupe vers
un son plus violent, qui donne naissance au brûlant Roger the enginer.
Dernier maillon de de ce fabuleux défilé de guitaristes,
Jimmy Page ne côtoie Beck que quelques jours. C’est néanmoins la notoriété des
yardbirds qui permet au grand musicien de studio de sortir de l’ombre, et de
diriger le groupe après que Jeff Beck soit parti démarrer une brillante
carrière solo. Devenu seul maître à bord , Page expérimente , cherchant une
façon de réinventer sa culture blues. C’est là qu’il joue les premières version
de « dazed and confused » , utilisant son archet de violon pour
accentuer la violence de ses improvisations.
Mais rapidement, les yardbirds ne lui suffisent plus , et
il se met en quête de musiciens capables de donner vie aux sons qu’il a en
tête. Il se dirige d’abord vers Steve Mariott, mais le chanteur n’est pas
encore prêt à quitter des small faces en pleine gloire psychédelique. Rencontré
alors qu’il faisait la première partie des stones en même temps que les
yardbirds , Terry Reid lui oppose le même refus . Reid lui conseil toutefois d’assister
au concert du band of joy, vantant les mérites de son chanteur.
Là , dans une petite salle proche du black country , où
les ouvriers anglais gagnent péniblement leur vie, il a une révélation.
Véritable Janis Joplin male , Plant chante avec une ferveur qui réinvente la
vision du chanteur rock tel qu’elle fut définie depuis Elvis.
Les deux hommes se retrouvent peu de temps après , et s’entendent
rapidement grâce à leurs passions pour les grands pionniers du blues. Rapidement
choisi pour devenir le chanteur du groupe que Page souhaite monter , Robert
Plant en profite pour imposer son ami John Bonham au poste de batteur. Ce
souhait fut un vrai cadeau pour Page , tant Bonham est un véritable Hephaistos
rock , forgeant ses rythmes sauvages et groovy avec la puissance d’un dieu grec.
La légende est enfin en marche lorsque John Paul Jones ,
qui a côtoyé Page lorsque les deux hommes travaillaient dans l’ombre des studios, rejoint
le gang. Renommé New Yardbird , le groupe commence à se souder en répétant « train
kept a rollin », classique des yardbirds lancé sur un rythme en forme de
cavalcade, qui dut coller parfaitement à la frappe écrasante de Bonham.
Dans la salle de répétition , les musiciens entrent dans
une symbiose tonitruante, comme si la réunion de ces cinq musiciens donnait
naissance à un cinquième élément. Pendant ce temps, un des personnages clef de
notre histoire commence à fréquenter le milieu rock.
Peter Grant est un homme hors norme , dans tous les sens
que l’on peut donner à ce terme. Son physique de géant russe lui ouvre les
portes du catch , avant que le cinéma ne le récupère pour le faire jouer dans
des séries B sous-rémunérées. Économisant ses cachets , l’ogre anglais parvient à
s’offrir un minibus.
Embauché par un grand tour manager , il conduit Chuck
Berry , Bo Diddley et Gene Vincent. Quelques mois plus tard , il s’associe à
Mickie Most , l’homme qui découvrit les animals, et avec qui il rachète le
contrat des Yardbirds. Lorsque le groupe se sépare , Grant devient
naturellement le manager des new yardbirds, qui deviennent Led Zeppelin après
leur première tournée.
Nous sommes enfin entrés au cœur de notre récit !
Convaincu du talent de ses poulains , Grant parvient à
les faire signer chez Atlantic. Alléché par le succès de l’ex groupe de Page ,
la maison de disque de Cream offre au zepp une liberté totale , et un cachet
jamais vu à l’époque.
Ce qui a sans doute convaincu Ertegun , c’est aussi le
premier pressage de ce qui deviendra led zeppelin I , apporté comme un précieux
message par Peter Grant. Ces riffs étaient en train d’écrire une nouvelle
histoire , et Atlantic devait en faire partie.
Led Zeppelin I
Trente-cinq heures , c’est le temps que pris Led Zeppelin
pour enregistrer l’annonce d’une nouvelle ère . Il faut dire que les bombes qui
composent ce disque furent mises en place à l’ancienne , la scène étant le
véritable cratère d’où naquit les explosions groovies du zepp. Le disque est
lui aussi doté d’une production minimaliste , Plant se contentant de chercher
le placement de micro capable de reproduire toute l’ampleur de ce nouveau
brasier . Les titres sont à peine retouchés, et laissent ainsi les pistes
déborder les unes sur les autres pour retrouver le groove spontané des sun
sessions.
Sans aucun artifice , la puissance de led zeppelin
explose dans nos oreilles dans une orgie hard blues. Page commence déjà à
marier les extrêmes, ses riffs plombés s’éteignant dans les arpèges mélodieux
qui ponctuent les débordements de babe i’m gonna leave you. Le rock cherche ,
toutes les décennies, une nouvelle façon de jouer le blues. Cette musique n’a
pas de d’âge , pas de but , elle est telle une vieille bécane que chaque
génération emmène vers d’autres chemins inexplorés.
Et tout dans ce disque annonce la voie que le rock
prendra lors de la prochaine décennie, des riffs tranchant de Page en passant
par la voix perçante de Plant , sans oublier bien sur la frappe pachydermique
de Bonham.
Les hommages se multiplient , soutenues par une musique qui
tient plus de la réinvention que de la récitation appliquée , ce qui n’empêchera
pas les soupçons de pillage. Il est vrai que les références sont nombreuses, le
groupe se réappropriant le « i can’t quit you babe » d’Otis Rush ,
avant de citer « the hunter » d’Howlin Wolf au milieu de « how
many more time ». Ajoutez à cela le texte de black mountain side ,
largement inspiré de blackwaterside d’Anne Briggs , et la réadaptation de babe
i’m gonna leave you de Joan Baez, et vous obtenez des soupçons de plagiat qui
perdurent aujourd’hui.
Pourtant , la musique que les anglais déploient , en plus de montrer
l’amour que le groupe voue au folk et au blues , fait muter ses deux
institutions musicales, avec une violence qui s’impose comme une réponse anglais
au chaos de Detroit (où les stooges et le MC5 débutent une carrière chaotique). Ce
mélange va vite devenir la bible d’une nouvelle génération de musiciens
amoureux de décibels , tout en restant très attachés au génie mélodique de la
pop sixties. En dehors des hard rockers , Johnny Ramones avouera avoir forgé son
jeu en reproduisant la simplicité viscérale de « communication breakdown ».
Cet album n’est pourtant pas le plus fulgurant du zepp, l’orgue
de John Paul Jones plombant l’ambiance à mi parcours (your time is gonna
come). C’est néanmoins le plus influent , celui qui annonce le passage à une
nouvelle ère confirmée par la séparation des Beatles la même année.
A sa sortie en 1969 , le premier album est un succès ,
surtout célébré dans une Amérique sensible au son de cette bande de rosbeef
jouant le blues avec une ferveur peu commune. Le Zepp va donc d’abord chercher
la reconnaissance sur la terre de ses pères spirituels, qui lui ouvrent les
portes du Fillmore.
Fondée par Bill Graham , la salle est le lieu de pèlerinage ou
des centaines de hippies vont rencontrer les nouveaux héros de la pop mondiale.
Zappa , le grateful dead , les allman brother , et de nombreux autres groupes
cultes ont foulé ce temple de la révolution psychédélique. Après son passage ,
le zeppelin entre dans une spirale infernale faite de concerts aux quatre
coins du globe, et d’orgies en compagnies de groupies locales, avant qu’Ahmet
Ertegun ne vienne leur imposer un retour rapide en studio.
Le rock est alors en pleine ébullition, Dylan a sorti sa
fameuse trilogie folk rock , les beatles ont écrit leur somptueux épitaphe avec
abbey road, et les stones démarrent leur retour au blues avec beggars banquet
et let it bleed.
Ajoutez à cela une ribambelle de groupes plus underground
, mais pas moins brillants , et vous comprenez que le rock est devenu un champs
de bataille où chaque groupe lutte pour sauver sa peau. Comme ci cela ne
suffisait pas , les média américains critiquent violemment Robert Plant , dont
ils ne supportent pas les gémissements Jopliniens . Jimmy Page lui-même commence
à douter de son chanteur , qui n’a pas rempli toutes ses attentes lors des
premières tournées.
Toutes ces tensions nourrissent la puissance de led
zeppelin II, enregistré entre les concerts , dans pas moins de treize studios.
Les sessions s’éternisent pendant plusieurs mois , la rythmique étant
enregistrée dans un premier studio , avant que le chant ne soit ajouté quelques
jours plus tard , ce qui transforme l’enregistrement du disque en assemblage sans
fin.
La première partie de ces enregistrements est réalisée en
Angleterre, avec le producteur qui sera responsable du second soft machine , et
de l’album de blind faith. En Amérique , Eddie Kramer prend le relais après
avoir produit les trois classiques du Jimi Hendrix experience. Ces nom
prestigieux montre que led zeppelin est sur le point d’entrer dans la légende ,
une entrée confirmée dès la sortie d’un album qu’on surnomme déjà « le
bombardier marron ».
Led Zeppelin II
Désolé de vous l’annoncer comme ça les mecs mais c’est
plié , terminé , naze !
Bon d’accord , vous avez maintenu l’illusion , ça fait
quand même presque cinquante ans que vous nous balancez la même sauce sans
réussir à la projeter aussi loin. On y a même cru , régulièrement , et on avait
pas tout à fait tort à l’époque.
« Machine head » était presque plus puissant ,
mais manquait un peu de relief , Uriah Heep avait un vrai talent pour les
mélodies épiques mais était un poil trop pompeux, et Cactus restait accroché au
blues comme un morpion à son testicule.
Mais bon , on avait déjà fait notre deuil , led zeppelin
ayant lui-même abandonné ces contrées sulfureuses pour flirter avec la folk de
Crosby Still et Nash. Ce II n’est pas seulement le prolongement logique du
premier , c’est un nirvana que le hard rock ne retrouvera jamais.
L’ascension démarre avec Whole Lotta love , et son riff
aussi puissant qu’une charge de mammouths en rut. Plant défend chèrement sa place
de chanteur, sa voix devenant un véritable instrument s’unissant à la guitare
dans un grondement lubrique.
Véritable alchimiste sonore , Page fait cohabiter l’ombre
et la lumière , des titres comme what is and what should never be ou ramble
on reprenant la structure en montagnes russes de dazed and confused. Led Zeppelin
prend désormais le temps de préparer ses décharges , ses éclaircies mélodiques
envoûtant l’auditeur avant qu’une nouvelle éruption heavy ne le transporte dans
une transe sauvage.
Ici , les breaks restent chargés de plomb, ce sont des
poudrières qui explosent lorsque les hurlements de Plant allument la
mèche . Les thèmes rejoignent ceux des grands pionniers du blues , et se
partagent entre les manifestes libidineux de whole lotta love et lemon song ,
et les complaintes d’amants trompés tel que « heartbreaker ». Sorte de
communication breakdown sous speed, heartbreaker sera d’ailleurs repris par
nirvana au début des années 90.
Led Zeppelin en profite pour déployer sa finesse
mélodique sur « thank you » , ballade à la mélodie Byrdsienne qui
semble annoncer le virage folk que son groupe prendra ensuite. Ajoutez à cela « ramble
on » sorte de rock Tolkenien épique à souhait , et vous obtenez la base de la
mythologie Zeppelinienne.
Alors , les marmots hurlant , vous allez sans doute me
demander pourquoi ce disque résonne plus fort que toutes vos ébauches
tonitruantes. Le dernier élément de réponse est sans doute à chercher dans ce bring it on home qui clôture le disque.
C’est un nouveau blues qui se dégage de ce riff assommant
, une nouvelle matière faisant carburer la locomotive rock plus vite que jamais
, et confirmant ce II comme l’aboutissement de ce qui fut entamé sur le
premier.
Led Zeppelin était rock avant d’être hard , et de ses enseignements
on ne retiendra malheureusement que les clichés.
Après la sortie du second album , led zeppelin est sur
le toit du monde. Les concerts deviennent alors de véritables triomphes , et les
cachets des musiciens leur permettent de mener la grande vie. Mais le rythme
infernale des tournées excède le groupe , qui accentue ses excès, pour le bonheur
de « journalistes » avides de scandales. Il est temps de prendre du
recul sur cette vie folle , et led zeppelin va profiter de la demande d’Ertegun
, qui réclame déjà un nouvel album, pour s’exiler au pays de Galles.
Théâtre des mythes Arthuriens, le vert pays leurs permet
de profiter du calme d’un cottage qui n’est même pas doté de l’eau courante et
de l’électricité. Le groupe n’y achèvera qu’un titre , « that’s the way »
, mais l’ambiance des plaines celtiques va largement inspirer les mélodies de son
troisième album.
Led Zeppelin III
« Nous venons du soleil de minuit où soufflent les
chauds printemps / le marteau de dieu mènera nos bateaux vers de nouvelles
terres. »
Comment imaginer meilleure ouverture que cet immigrant
song ?
Sur l’introduction, la voix de Plant sonne comme le
tocsin annonçant l’arrivée des sanguinaires nordistes sur les terres anglaises. L'alliance entre ce récit épique et la guitare tonitruante de Page fait le lien entre
le II et la douche froide que les fans vont prendre sur les titres suivants.
Comme le disait Page lui-même , il aurait été impossible de faire la même chose une nouvelle fois , le résultat n’aurait pu sonner que comme un décevant frelaté de l’originale. Ce qui choquera , c’est donc cette seconde face , et les larmoiement acoustiques de Friends , qui font dire à beaucoup que Led Zepp creuse désormais le même sillon soporifique que Crosby Still and Nash.
Aux titres acoustiques , le zepp offre pourtant des
mélodies mystiques, tel un Dylan ayant troqué la philosophie beat pour les
récits chevaleresques de Chretien de Troyes. Gallows Pole fait même cohabiter la
rusticité du country folk , et les récits sombres du blues originel, sur un
rythme qui flirte avec le bluegrass.
« Ton frère m’a apporté de l’or, ta sœur a réchauffé
mon âme/ Mais maintenant je ris et tire de toutes mes forces et te regarde te
balancer au bout de cette potence. »
Ces mots sont de Robert Plant , comme tous ceux qui
compose ce III, et ils montrent un talent d’écriture que n’aurait pas renié
Leadbeally.
Le blues , Led Zeppelin le transcende d’ailleurs une nouvelle
fois sur « since I’ve been loving you », monument inoxydable du
répertoire zeppelinien. Cinq notes, une voix, un rythme , voilà de quoi est
fait ce classique. Comme tous les classiques du blues , c’est la ferveur de l’interprétation
qui fait toute la différence.
Et puis il y’a bien sur son parfait opposé, celebration
day, compilation de quatre riffs succédant dans un chaos virtuose que les fils
de King Crimson ne feront qu’effleurer. Et pourtant , on retiendra surtout
cette seconde face mal aimée, où la batterie sait être puissante sans devenir
envahissante, où le chant de Plant s’adapte au registre des titres , et où la
guitare de Page sonne parfois comme celle d’un troubadour céleste.
Ce sont ces titres qui font que ce disque est devenu le
plus incompris de l’histoire du zepp, C’est eux aussi qui le rendent passionnant.
Plus que Wishbone ash, le zep a su donner ses lettres de noblesse à un son enivrant,
une nouvelle forme de puissance hard folk aussi transcendante que les
déflagrations précédentes.
Bien que décrié , III est loin d’être un échec
commercial. A sa sortie, le disque est premier des classements américains et
australiens , et le constat est le même dans plusieurs pays européens. C’est un
résultat jamais vu depuis les beatles, mais ce bon classement ne durera que
quelques jours. Alerté par ce rapide déclin des ventes , Ahmet Ertegun demande
au groupe de revenir à un son plus proche de ses deux premiers albums, pour
éviter que la fièvre ne retombe.
Nous somme alors en 1971, les stones viennent de sortir
sticky finger , et les Who partent promouvoir Tommy lors de performances
grandiloquentes. Dans sa maison de Pangbourne , Jimmy Page se passionne pour
les théories de Crowley, et commence à écrire ce qui deviendra « l’album aux
runes ».
Pour l’enregistrement , Andy John propose de louer le studio
mobile des stones, mais Page préfère ramener son groupe dans le cottage où fut
conçu led zeppelin III, avec quelques escales au studio island. Ne supportant
plus l’acharnement des critiques , qui prennent son groupe pour un effet de
mode, le guitariste impose une pochette sans titre ni nom.
IV deviendra vite un des disques les plus vendus de tous
les temps, et la critique ne pourra que saluer l’exploit.
Led Zeppelin IV
Dans le grand débat visant à élire le plus grand disque
du Zepp , deux noms sortent du lot , le second et ce IV. Ce constat montre une
vision étriquée de ce premier album , tout juste salué comme un retour dans la
forge électrique, après la pause bucolique du III.
Ce IV n’est pourtant pas fait du même bois, une maturité
aux accents heavy folk ayant remplacé la sauvagerie primaire du bombardier brun.
Séduit par l’écho profond de « everybody know this is nowhere », Page l’adapte
parfaitement ici. C’est surtout sur la batterie que cet écho fait des
merveilles, le guitariste ayant placé les micros en hauteur afin de restituer
toute la raisonnance de cette machine à groove qu’est John Bonham.
Décharge électrique tonitruante , Black Dog est la
rencontre de deux riffs s’enchainant dans une successions de transitions
abruptes . Hurlant au mileu de la tempête , Plant fait le lien entre les deux
secousses, bien aidé par la frappe pleine d’autorité de John Bonham, dont le
feeling boogie justifie largement son surnom de « bête ».
« Faire ce que tu veux doit être ta seule loi »
. Page applique à la lettre cette pensée de Crowley , ne renouant avec la
tradition que le temps d’un « rock n roll » à faire rougir Chuck
Berry, et du blues langoureux de « when the leave break ». Autant que
l’ombre des grands pionniers du rock et du blues , l’influence de Tolkien plane
plus que jamais sur ce disque.
Influencé par les écrits de l’auteur du seigneur des
anneaux, et par l’histoire de l’Ecosse, Plant signe une fresque folk , avec la mandoline
de Page en guise de harpe Homérique. Sa voix laisse régulièrement la place aux
lamentations de Sandy Denny , qui illustre ainsi ce mélange de drame et d’exploits
glorieux qui fait les grands récits épiques.
Le titre représente surtout une introduction parfaite
pour Stairway to heaven, grand poème mystique dont la mélodie semble effectuer une
longue ascension vers le Vahalla. La recherche de l’originalité a toujours été
le credo qui a guidé la carrière du zepp, avec ce IV cette recherche trouvait
un nouvel aboutissement.
« Trample underfoot » invente un blues syncopé
et synthétique , avant que four stick ne montre toute la virtuosité d’un Bonham
poussé dans ses derniers retranchements. Tout ici sonne neuf , original, comme
si chaque disque du groupe devait définir une nouvelle route musicale.
IV n’est pas meilleur que le II , mais il n’est pas
moins bon non plus. C’est un exploit musical destiné à marquer les siècles à
venir.
Le succès de IV dépassa toutes les espérances de ses
géniteurs. Vendu à plusieurs millions d’exemplaires , et affectueusement
surnommé l’album aux runes, le vinyle a prouvé que Led Zeppelin était bien plus
qu’une mode passagère, et a fait du groupe une institution respectée .
Jouissant enfin d’un succès obtenu au terme d’une dure
lutte , le groupe ralentit le rythme, chacun profitant des pauses entre les
tournées pour goûter aux joies d’une vie plus apaisée. Le rythme des tournées
reste tous de même soutenu , le rock est encore en pleine ébullition et Peter
Grant ne veut pas que ses poulains se fassent éclipser par l’avalanche de chefs-d’œuvre de cette année 1972.
Cette année là , Bowie initie la vague glam sous les
trait de Ziggy Stardust, et les stones font encore parler la poudre blues rock
sur « exil on the main street ». Mais surtout , les mélodies jazzy de
King Crimson annoncent l’avènement de sa cour vouée au culte de l’élitisme
symphonique, et des rythmes cool de Miles Davis.
L’époque célébre de nouveau l’élitisme , tout en gardant
ce goût pour la violence initiée par Led Zepp I et les sauvages de Detroit.
House of the Holy
La naissance d’un hard rock progressif ?
Voilà comment Jean Michel Guesdon ouvrait son chapitre
sur house of the holy. Tout d’abord , il faudrait se mettre d'accord sur la
définition du rock progressif. Certains diront qu’il s’agit du chemin balisé par
Jethro Tull , Yes , et autres Genesis . Mais c’est oublier le renouveau qui eu
lieu dans les années 90.
Comme toute les
étiquettes , rock progressif sert surtout à qualifier une tendance temporaire , c’est-à-dire
celle des seventies. Mais , si l’on prend la définition de progressif au pied
de la lettre , on peut aussi bien y ajouter le sergent pepper des beatles ,
village green des kinks , la trilogie électrique de Dylan , et autres monuments
avant gardistes.
A ce moment là , Led Zeppelin arrive dans les premiers
groupes capable de qualifier ce désir de partir sans cesse sur des routes
inexplorées. Il a déjà payé les frais de ses expérimentations après la sortie du III , disque qui aurait mérité mieux que les commentaires tièdes qu’il
déclencha . La majorité aurait préféré voir le groupe barboter dans la même
mare juvénile que ses rejetons hard rock , le succès aurait ainsi été plus immédiat, mais la fascination moins durable.
Et voilà que , avec house of the holy , ces même fans se
retrouvaient face au disque le plus complexe , le plus travaillé , et le plus
aventureux que leur groupe ait produit. Placé en ouverture , the song remain
the same démarre sur un riff en forme de compte à rebours , avant que Bonham et
Jones ne fassent décoller la machine sur un rythme ébouriffant.
Page tresse alors une somptueuse fresque sonore , ses
enchaînements de riffs donnant une leçon de virtuosité à Yes. Les harmonies
somptueuses explosent ainsi dans un riff plein de reverb, sommet d’un feu d’artifice
lumineux. Quelques titres plus tard , les claviers hypnotiques de John Paul Jones
permettent au Zepp de retrouver cette ambiance épique , la voix d’elfe de Plant
ajoutant au récit fascinant de « no quarter » une aura mystique.
Rain song prend le relais sur un ton plus apaisé que l’on
doit à une remarque de George Harrison. Lors de sa rencontre avec le Zepp , celui-ci
aurait affirmé : « Le problème avec vous les gars , c’est que vous n’écrivez
jamais de ballade ». Piqué au vif , Page crée une harmonie romantique ,
qui permet à son chanteur de retrouver la classe mélodieuse de « thank you ».
Cette fois l’incompréhension viendra du nouvel amour de
Page pour le Ska et les rythmes jamaicains, qui colore le riff de « dyer
maker » , qui veut tout simplement dire jamaica. Le groupe en profite pour
faire un petit clin d’œil à James Brown avec le rythme funky de the crunge.
Deep purple ne tardera d’ailleurs pas à reprendre ses
rythmes funky sur « burn » , prouvant ainsi que , même si il est
encore incompris , led zeppelin a encore sorti un grand disque .
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