La nouvelle est tombée comme une bombe : les stooges
se reforment. Iggy ne pouvait achever la carrière du plus grand groupe maudit
avec le mitigé the weirdness. Et puis il fallait rendre un dernier hommage à
Ron Asheton, parti rejoindre Johnny Thunders au paradis des loosers
magnifiques. Pendant des années, les
stooges furent le groupe à abattre, le destin, le show business , et un public
encore coincé dans les vapes psychédeliques refusant de lui tresser la couronne
de lauriers qu’il aurait mérité.
Les stooges ont tout de même survécu pendant cinq ans ,
cinq années de carrière chaotique qui laissèrent Iggy exsangue. L’homme
mettait littéralement sa vie en jeu lors de chaque concert, se shootant pour
accentuer son charisme bestiale, le succès n’était pas encore là, et pourtant
la légende de l’iguane naissait dans les petites salles où les stooges
survivaient.
Il faudra toute la patience et le génie d’un Bowie pour
sortir l’iguane de sa période sordide. En lui rendant visite pendant son
internement en hôpital psychiatrique, avant de produire « the idiot »
et « lust for life » , Bowie a ouvert la deuxième partie de la
carrière d’Iggy.
La suite on la connait, Bowie joue china girl afin d’offrir
des royalties à son ami dans la dèche, il s’occupe discrètement du clavier lors
des concerts suivant la sortie de « lust for life » , et lui permet de
survivre jusqu’à l’arrivée inespérée du succès. Sorti en 1996, trainspotting
transformait « lust for life » en tube plus de dix ans après sa
sortie. « D’un seul coup , j’entendais « lust for life » dans
tous les bars » dira l’intéressé.
Alors quoi de plus logique que de clore la romanesque
histoire de ses stooges avec un disque nommé « ready to die » ?
L’enjeu n’était pas seulement de produire un chant du cygne digne de ce groupe
légendaire, Iggy devait encore prouver qu’il était bien vivant. Car aux affres
de la loose ont succédé les compromis fait à un show business qui découvrait d’un
seul coup le pouvoir de fascination de l’Iguane. Transformé en homme sandwitch
pour des marques diverses et variées , se fourvoyant dans des productions très pop
et sans saveur, l’homme semblait vouloir décrocher le jackpot à n’importe quel
prix. Loin de s’en excuser, il résumera
sa philosophie avec un nihilisme très punk « le rock est surtout présent
dans les pubs, je suis donc content d’y mettre mes morceaux ».
Voila pourquoi l’ex précurseur des hordes punks apparait
ici dans une ceinture de dynamite , le viseur du public pointé sur sa chaire
impie. Heureusement, « ready to die » est une véritable résurrection.
Reprenant la formule de search and destroy, qui alternait charges corrosives et
accalmies tendues, il voit les stooges reprendre les choses-là où ils les avaient
laissé.
L’ouverture tout en muscle s’impose comme un echo à « search
and destroy » , la bombe atomique ouvrant « raw power » . La
guitare rugit de nouveau au milieu de musiciens soudés comme la horde pré punk
qu’ils furent à la grande époque. Au milieu de ce déluge, certains regrettent qu’Iggy
reprennent parfois le ton de crooner qu’il apprit lors de l’enregistrement de « lust
for life ».
Aux hymnes à la débauche tels que « penetration »
ou « shake appeal » succèdent des ballades langoureuses , pas
toujours dénuées d’agressivité (beat that guy), mais où Iggy s’impose plus comme
un vieux sage procurant ses leçons de vie que comme le monstre débauché qui le
fit connaitre.
La critique est fondée, mais elle oublie un peu vite que l’homme
a survécu en variant ses registres , et que c’est cette voix chaude qui fit le
sel de « the passenger » et autres tubes de sa carrières solos. Iggy
ne s’est pas adouci, il a juste mûri, montrant ainsi qu’il était encore bien
vivant.
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