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mercredi 5 juin 2019

Dereck and the Dominos : Live At Fillmore




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Parfois , on regarde le passé avec une certaine incompréhension mêlée de ressentiment. Comment des disqueS comme white light white heat , les premiers stooges , et surtout Layla and other love songs ont-ils pu tomber si vite dans les bacs à soldes ? Ok , pour layla Clapton avançait masqué , il avait sans doute aussi besoin de se poser après l’enthousiasme engendré par cream et Blind Faith. Ces deux projet montraient un Clapton plus démonstratif , prolongeant les compositions de ses solos lumineux sur blind faith, et surtout sur la seconde partie de wheels on fire.

Le piège s’était alors refermé et, à l’heure où Led Zeppelin commençait sa brillante odyssée , le puriste Clapton était célébré pour ses tendances les plus excentriques. L’homme s’est donc éclipsé quelques temps , pour mettre son doigté au service de George Harrison sur « All Things must pass ». Lors de ces séances , il rencontre Carl Radle , Bobby Whitlock , et Jim Gordon.

Le courant entre les musiciens passe si bien qu’ils décident rapidement de partir en tournée ensemble, mais Clapton souhaite rester anonyme. Prévenue de ce souhait, leur première partie les présente de cette façon : « mesdames et messieurs , dereck and the dominos », le nom restera.

Le groupe commence ensuite à travailler sur son premier disque, qui doit permettre à son leader de se libérer de la blessure engendrée par son amour non partagé pour Pattie Boyd , la femme de son ami George Harrison. Mais l’inspiration ne vient pas et, voyant son groupe stagner, le producteur Tom Dowd , qui a aussi travaillé pour les allman brother sur « iddlewid south », propose à Clapton d’aller voir les frères Allman en concert.
Après le set , Duane avoue être un grand admirateur de celui qui se fait appeler « god » , et Clapton lui donne une place dans son nouveau groupe. Le sudiste sera la clef de voute qui va déclencher une véritable éruption blues rock. « tell the truth » ,  « key to the highway » … Tous ces titres n’aurait pas eu la même saveur sans son inimitable guitare slide et ses riffs groovy.

On en vient donc à ce qui aurait potentiellement pu rebuter les fans de slowhand à l’époque : Layla est beaucoup plus carré que les délires de blind faith. Privé de l’aura de son géniteur , le disque est perçu comme une œuvre rétrograde  produite par un groupe sans gloire. C’est que la présence de Duane Allman permet justement de recadrer un Clapton ayant tendance à se perdre dans son élan. Les deux hommes partagent l’amour du blues carré et sans fioriture, et la plupart des titre de Layla ne montrent rien d’autre, forgeant un son plus proche du premier Johnny Winter que de l’avant-garde hard blues. Seule concession faite à la simplicité puriste, Layla s’articule tout de même autour d’une mélodie gracieuse, qui empêche tout emballement sur amplifié.   

Bref , le rejet du public est clair , et même le morceau titre n’atteindra pas le sommet des charts avant 1972 , soit près de deux ans après sa parution. Entre temps, après ces résultats désastreux, le groupe s’enfonce dans la dope et les luttes d’égo.

Sortie en 1970, ce live at fillmore east est mieux accueilli, il faut dire qu’il correspond mieux à « l’air du temps ».

Le groupe garde ce feeling bluesy , mais ne déroge pas à la tradition du fillmore , qui veut que la plupart des artistes foulant son sol se lancent dans de longues improvisations sans filets. Résultat , slowhand redevient le centre du groupe , parsemant ses solos bluesy de quelques stridences proto hard rock. D’ailleurs, le disque s’ouvre avec la symphonie de piano survolté, batteries folles, et solos délicieusement ondulant que constitue « got to get better in a little while ». Dereck et ses dominos remettent ça quelques titres plus tard , faisant de tell the truth une longue complainte parsemée de solos rageurs. Le climat reste serein , les moments les plus puissants ne cassant pas ce feeling puriste qui fit la beauté de l’album Layla , mais les titres gagnent en puissance et en spontanéité.

On peut encore débattre longtemps sur le meilleur album auquel Clapton a participé, hésitant ainsi entre le précurseur « bluesbreaker with Eric Clapton » , et le plus puriste « Layla » , mais il faut avouer que ce disque représente un aboutissement unique.

Clapton semble y trouver ce qu’il a toujours cherché , cet équilibre fragile entre la spontanéité et la créativité de sa génération et la rigueur liée à son obsession pour le blues.