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jeudi 3 octobre 2019

Iggy Pop : Free


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« Iggy est quelqu’un de très cultivé , mais quand il commence à sortir sa bite ça devient ennuyeux ». Voilà comment Bowie parlait de son ami de Detroit , soulignant ainsi une facette que l’iguane venait juste de dévoiler sur « the idiot » et « lust for life ». Le titre du premier était un clin d’œil à Dostoievski , tandis que la musique transformait le guerrier punk en crooner raffiné. C’est néanmoins l’énergie punk du personnage, transpirant encore dans le riff de « lust for life », qui le rendit célèbre en rythmant les déboires d’Ewan Mcgregor dans « trainspotting ».   

Après cela, le héros sorti de la dèche réclamait son dû, aguichant le grand public avec la production clinquante de bla bla bla. Le plan n’a pas marché plus que ça et, conscient que sa musique n’atteindrait plus le sommet des hit-parades, il la vendit à l’annonceur le plus offrant. C’est ainsi qu’est né le nouvel Iggy , homme sandwich entretenant son image et ses créations en se vendant au plus offrant.

Toute tentative de s’éloigner de sa fureur stoogienne était désormais vouée à l’échec , comme ce préliminaire, aux accents expérimentaux pas si honteux que ce qu’on a pu en dire. Même lors du retour des stooges , on lui reprochait une voix trop soignée , et des mélodies plus évidentes qu’à la grande époque.

Pourtant , cette voix , semblant venir d’un vieux guerrier ayant tout connu , est aussi fascinante que celle de son héros Jim Morrison. Même post pop depression , annoncé comme un simple retour au rock froid des années passées avec Bowie , prenait des allures lumineuses grâce à cette voix chaleureuse. Iggy était désormais plus à chercher dans le manifeste grave d’american vahalla , que dans les saillies de vultures . Tout l’album était d’ailleurs doté de ce feeling de vieux baroudeur, quelque part entre Sinatra et Morrison.

Voilà pourquoi ce disque, dans son concept comme dans sa musique est le véritable aboutissement d’une carrière solo extrêmement riche. L’idée donnant naissance à free a germé après que l’Iguane ait animé sa propre émission de radio à la BBC. Là promu au rang de DJ , l’homme redécouvre le goût du partage de sons peu diffusés , la soif de nouvelles découvertes , bref tout ce qui définissait un DJ avant l’avènement de rayeurs de vinyles décérébrés.

Forcément, ses sons ont nourri son imaginaire, pénétrant dans son esprit pour y planter quelques graines fascinantes. On imagine, à l’écoute de ce disque, que le Pop diffusait pas mal de jazz, tant free est marqué par une douceur réconfortante que n’aurait pas renié Miles Davis.

Free ne ressemble à rien de ce qu’a produit Iggy , ce n’est ni une giffle braillarde revigorante , ni un hommage foireux à quelques grandes figures du passé. Ce n’est pas non plus un rock de crooner. C’est un disque dans lequel il faut s’immerger, pour mieux en ressentir toute la beauté poétique.

Oui , vous avez bien lu , le dernier album de l’iguane est poétique . Une sensibilité se cachait sous ses airs de brute , tel un personnage de Guy Des Cars *.  Quand l’homme chante « I want to be Free » , sur une musique atmosphérique , il parle de ce sentiment qu’il a poursuivi toute sa vie, cette ivresse de celui qui n’a ni attache , ni responsabilité.

C’est aussi ce sentiment qui l’a amené à courir après le succès, torturé par cette confrontation entre les exigences du show business et ses envies artistiques. A travers cette musique, sombre tout en restant lumineuse, sobre tout en restant chaleureuse, il ne fait que montrer qu’il est venu à bout de cette contradiction.

C’est là que l’homme se dévoile vraiment, citant Lou Reed dans un décor musical introspectif et intimiste. Sans entrer dans le détail de propos qui pourraient paraitre éminemment politique, on peut souligner qu’il s’agit de la plus lumineuse poésie musicale depuis « the end », la poésie de Lou Reed n’ayant jamais trouvé une voix aussi habitée.

James bond est plus rock avec sa rythmique irrésistible, et toujours la voix du crooner pop lancée sur un bebop sautillant. On en regretterait presque qu’il reprenne son rôle de chevalier punk, crachant sur la société de consommation dans un langage fleuri que n’aurait pas renier Johnny Rotten sur Dirty Sanchez.

C’est que , en effet , Iggy est tellement plus intéressant quand il prend le temps de tisser ses ambiances méditatives , quand la musique expérimentale emporte l’auditeur dans des paysages que l’on croyait réservés au jazz expérimental.   

Les musiciens sont grandioses, se contentant d’habiller cette voix qui deviendrait presque une œuvre à elle seule. Ici elle porte l’étendard d’un manifeste exprimant la victoire d’un homme sur son sentiment d’insécurité, le vieux guerrier a trouvé son graal et l’expose à nos oreilles émerveillées.   


*Guy Des Cars : La brute 

   

mardi 20 août 2019

Iggy Pop and the Stooges : Ready To Die



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La nouvelle est tombée comme une bombe : les stooges se reforment. Iggy ne pouvait achever la carrière du plus grand groupe maudit avec le mitigé the weirdness. Et puis il fallait rendre un dernier hommage à Ron Asheton, parti rejoindre Johnny Thunders au paradis des loosers magnifiques.  Pendant des années, les stooges furent le groupe à abattre, le destin, le show business , et un public encore coincé dans les vapes psychédeliques refusant de lui tresser la couronne de lauriers qu’il aurait mérité.

Les stooges ont tout de même survécu pendant cinq ans , cinq années de carrière chaotique qui laissèrent Iggy exsangue. L’homme mettait littéralement sa vie en jeu lors de chaque concert, se shootant pour accentuer son charisme bestiale, le succès n’était pas encore là, et pourtant la légende de l’iguane naissait dans les petites salles où les stooges survivaient.

Il faudra toute la patience et le génie d’un Bowie pour sortir l’iguane de sa période sordide. En lui rendant visite pendant son internement en hôpital psychiatrique, avant de produire « the idiot » et « lust for life » , Bowie a ouvert la deuxième partie de la carrière d’Iggy.

La suite on la connait, Bowie joue china girl afin d’offrir des royalties à son ami dans la dèche, il s’occupe discrètement du clavier lors des concerts suivant la sortie de « lust for life » , et lui permet de survivre jusqu’à l’arrivée inespérée du succès. Sorti en 1996, trainspotting transformait « lust for life » en tube plus de dix ans après sa sortie. « D’un seul coup , j’entendais « lust for life » dans tous les bars » dira l’intéressé.  

Alors quoi de plus logique que de clore la romanesque histoire de ses stooges avec un disque nommé « ready to die » ? L’enjeu n’était pas seulement de produire un chant du cygne digne de ce groupe légendaire, Iggy devait encore prouver qu’il était bien vivant. Car aux affres de la loose ont succédé les compromis fait à un show business qui découvrait d’un seul coup le pouvoir de fascination de l’Iguane. Transformé en homme sandwitch pour des marques diverses et variées , se fourvoyant dans des productions très pop et sans saveur, l’homme semblait vouloir décrocher le jackpot à n’importe quel prix.  Loin de s’en excuser, il résumera sa philosophie avec un nihilisme très punk «  le rock est surtout présent dans les pubs, je suis donc content d’y mettre mes morceaux ».

Voila pourquoi l’ex précurseur des hordes punks apparait ici dans une ceinture de dynamite , le viseur du public pointé sur sa chaire impie. Heureusement, « ready to die » est une véritable résurrection. Reprenant la formule de search and destroy, qui alternait charges corrosives et accalmies tendues, il voit les stooges reprendre les choses-là où ils les avaient laissé.

L’ouverture tout en muscle s’impose comme un echo à « search and destroy » , la bombe atomique ouvrant « raw power » . La guitare rugit de nouveau au milieu de musiciens soudés comme la horde pré punk qu’ils furent à la grande époque. Au milieu de ce déluge, certains regrettent qu’Iggy reprennent parfois le ton de crooner qu’il apprit lors de l’enregistrement de « lust for life ».

Aux hymnes à la débauche tels que « penetration » ou « shake appeal » succèdent des ballades langoureuses , pas toujours dénuées d’agressivité (beat that guy), mais où Iggy s’impose plus comme un vieux sage procurant ses leçons de vie que comme le monstre débauché qui le fit connaitre.

La critique est fondée, mais elle oublie un peu vite que l’homme a survécu en variant ses registres , et que c’est cette voix chaude qui fit le sel de « the passenger » et autres tubes de sa carrières solos. Iggy ne s’est pas adouci, il a juste mûri, montrant ainsi qu’il était encore bien vivant.