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mercredi 20 octobre 2021

Non au woke'n roll !

 


Je m’étais promis, lors de la création de ce magazine, d’éviter au maximum l’actualité. Dans nos téléphones, nos journaux, sans oublier les affiches, cette vipère nous inocule déjà trop son venin aliénant pour que je vienne en rajouter une couche. Et puis, contester les beuglements futiles de la meute moderne, mettre les mains dans cette fange nauséabonde rendant notre quotidien irrespirable, c’est se laisser contaminer par la folie ambiante.  Je n’ai donc pas bronché quand le patron de "Spotify" a affirmé que les artistes ne « travaillaient pas assez », j’ai retenu ma colère face à la foule d’illuminés gauchistes prenant le rock en otage dans des livres stupides. J’ai même ravalé mes sarcasmes quand le bébé de "Nevermind" s’est rendu compte, trente ans après la publication, que l’on voyait son sexe sur la pochette de l’album. Tout ça n’est pour moi que les gesticulations d’un monde ridicule, d’une modernité réinventant l’obscurantisme moyen âgeux.

Je n’ai même pas bronché quand, au fil des années, j’ai vu des « auteurs » qualifier une des plus belles musiques du monde de misogyne, raciste, homophobe… A force de contester systématiquement les idées qui nous choquent, on finit par oublier de développer les siennes. Et  j’ai mis assez de temps à le comprendre pour ne plus jamais l’oublier. Mais voilà que, après leur avoir lancé leurs séries d’insultes en -phobes, les curés wokes ont fini par faire plier les Stones. Le plus grand groupe du monde a ainsi annoncé qu’il ne jouerait plus "Brown sugar", avant qu’il ne parle d’une nouvelle version de "Sticky Fingers" où n’apparaitrait pas ce chef d’œuvre.

Qu’ils me permettent d’abord de les avertir : en le faisant, ils mettent le doigt dans un engrenage infernal. Je suis toujours étonné de constater que l’homme préfère toujours la soumission, en pensant que celle-ci lui permettra d’obtenir la clémence de ses bourreaux. L’humanité croit toujours se libérer en obéissant, mais c’est précisément parce qu’elle obéit trop qu’elle ne sera jamais libre. Leur liberté, les Stones s’en foutent, ils préfèrent faire leur petit business, ils aiment trop les dollars pour risquer de perdre le marché américain, ils vendront tout ce qu’ils peuvent au plus offrant. En émasculant "Sticky fingers" , ils donnent raison à tous ces snobs qui voient le rock comme une musique purement commerciale, ils crachent sur une œuvre que l’on croyait intouchable.

Monsieur Jagger, puisque vous êtes l’auteur de ce chef d’œuvre que vous n’assumez plus, jusqu’où êtes-vous prêt à aller pour l’argent ? Allez-vous aussi faire disparaitre "Honky Tonk Women" et "Stray cat blues" si ils sont taxés de misogynie ? "Sister morphine" va-t-il disparaitre pour une supposée apologie de la drogue ? "Paint it black" sera-t-il effacé parce que quelques acéphales le trouveront raciste ? Les personnes auxquelles vous vous soumettez sont des fanatiques, leur bêtise n’a d’égal que leur puritanisme guerrier. Alors, êtes-vous prêt à détruire l’œuvre de votre vie, à démonter une à une toutes les pièces formant la formidable œuvre stonienne ?

Et Keith, qu’en pense-t-il ? Lui qui saluait votre coup de génie dans sa biographie. Le rebelle ultime est-il rentré dans le rang ? Les Stones ne sont-ils plus que des bourgeois exploitant le filon d’une légende dont ils ne sont plus dignes ? A moins que vos frasques et l’engouement autour de votre œuvre ne furent qu’une grande escroquerie cherchant à capter l’argent d’une jeunesse en pleine émancipation. Pendant que j’écris ces lignes, la version originale de "Sticky Fingers" tourne sur ma platine. Je me rappelle alors  à quel point cette œuvre, comme tout ce que les Stones créèrent de 1968 à 1972, est une merveille. Alors n’oubliez pas qu’elle fut influencée par Bo Diddley, Muddy Waters et autres BB King, des hommes prêts à mourir de faim pour leur musique.

Les wokes qui vous attaquent ne sont que les fanatiques d’un obscurantisme qui passera de mode. Votre musique par contre est immortelle, car elle puise dans une culture centenaire. Cette culture, c’est celle du blues. Et, tant qu’il subsistera encore un peu d’humanité dans cet occident hystérique, on trouvera encore des centaines de personnes admirant le swing de "Brown sugar" et autre chef d’œuvre stonien. Alors, messieurs les membres du plus grand groupe du monde, n’oubliez pas qu’en mutilant "Sticky fingers" c’est avant tous ces gens que vous insultez.