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dimanche 12 janvier 2020

Bob Dylan : Travelin Thru


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Dylan et Cash , comment rêver plus belle affiche pour ce nouvel épisode des bootleg series ? Les deux hommes se sont rencontrés en 1962, à l’époque où Cash est au sommet de sa gloire. Dylan, lui n’est qu’un troubadour obnubilé par Guthrie , un rêveur répétant ses titres dans un garage. Impressionné par ce qu’il entend lors de leur rencontre , Cash en parle à Columbia , qui récupérera bientôt le petit prodige, quant John Hammond verra en lui le futur de la folk.

Et puis le temps a passé, le jeune prodige est devenu le prophète beats de sa génération, et les rengaines de Cash se sont empoussiérés jusqu’à en faire un has been méprisé. Cash voyait dans Dylan le sauveur d’une folk en pleine déperdition, fossilisé par un conservatisme niais, et il eut raison au-delà de ses espérances.

Alors que son mentor était resté un pur produit de son époque, qu’il continuait à écrire des rengaines sentant bon les campagnes américaines , et à ressasser le même rythme bucolique , Dylan a affronté le conservatisme de front. Aussi haïe fut elle à sa sortie , sa trilogie électrique a achevé d’imposer son visage au sommet des grandes figures des son temps.

Cash, lui, vivait un déclin vertigineux sur fond de drogues et de rengaines acoustiques qui n’intéressaient plus personne. Cash et Dylan n’étaient pourtant pas les deux opposés d’une folk déchirée entre tradition et avant gardisme, leurs œuvres de l’époque étaient complémentaires. Après tout, aussi électrique soit il , « highway 61 » est parcouru par cette force rythmique , cette énergie viscérale que Cash connut sous les traits de ses amis Presley et Cochran.

Quelques mois plus tard, voilà que les deux hommes se rejoignent artistiquement, Dylan ayant sorti deux disques campagnards parcourus de références bibliques que n’aurait pas reniées l’homme en noir. Le public le cloue encore au pilori, il faut dire que son sourire narquois sur la pochette de « john whesley hardin » lui semble destiné. C’est pourtant dans ces mélodies poussièreuses que les groupes San Franciscain viendront chercher un second souffle , après s’être remis de la fin du rêve hippie.

Plus encore que son prédécesseur, Nashville Skyline était un magnifique retour à la terre, surtout grâce à son ouverture poignante. « North Country Girl » était la communion entre deux générations de rockers, la voix de Cash sortait des arpèges Dylanien comme une force ancestrale enfouie.

On pourrait presque prendre ce titre comme l’annonce du retour de l’homme en noir, qui publie son incontournable live à folssom la même année. Le retour du grand Bob auprès de son vieil ami , aussi ringard qu’il paraisse encore à l’époque , était donc l’aboutissement logique d’une démarche entamée sur John Whesley Hardin. Mais la tradition qu’ils voulaient célébrer ne venait pas seulement des terres de la country folk.

Ecoutez matchbox , un des rares titres électriques de ce bootleg serie , et vous découvrirez deux hommes habités par le rock originel. Ce rock qui s’exprime de façon rugueuse à travers la voix de Cash , et annonce ce qui sera flagrant sur rusty cage , Cash a le rock n roll dans le sang.

A côté de sa puissante voix de baryton, celle de Dylan a du mal à s’imposer dans les chœurs, comme si le grand Bob conservait encore une certaine timidité face à ce géant que tous pensent dépassé. Et puis, les entendre chanter walk the line , titre aussi culte que « Jailhouse rock », c’est revivre l’histoire du rock en direct.

Il y’a peu de disques qui donnent cette impression de vivre un moment unique , un passage déterminant , la fin glorieuse d’un épisode historique. Travelin thru est de ceux-là , l’expression d’une tradition musicale qui ressurgit des vapeurs psychédéliques.

Travelin Thru rappelle ces scènes intimistes, que Steinbeck a si bien dépeintes dans Tortilla flat , c’est l’amitié de deux hommes s’échangeant leurs répertoires, et le célébrant à travers des duos acoustiques, dans le plus pur esprit folk.

En dehors de walk the line , on a aussi droit à un « ring of fire » plus posé , où Cash mesure son chant pour permettre à son ami de souligner sa mélodie. « you are my sunshine » semble lui aussi chanté depuis ces caravanes, dans lesquels les prolétaires américains fuyaient la misère de la grande dépression. Jouée de la même façon elle fait partie de ce même écrin rustique et somptueux dans lequel sont enveloppés les bluettes country folk telles que « wanted man » ,  « girl from the north country » , et même un « don’t think twice it’s alright » des plus dépouillés.

Travelin thru a le charme de ses vieilles reliques dégotées au fond d’un grenier poussiéreux, le témoignage d’un passé révolu , mais incontournable.   

   



  

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