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samedi 29 mai 2021

Flower kings : Adam and Eve

 


Le clavier chante dans un écho gracieux, une voix familière décrit de nouveaux mondes merveilleux. Sorti en 2004, Adam and Eve est un des disques les plus atmosphériques des Flowers kings. Alors que l’opus précédent devait sa beauté à une débauche de notes lumineuses, Adam and Eve est plus apaisé. Tenant le premier rôle, le synthétiseur arrondit les angles d’instrumentaux souvent très mesurés. Pour donner une colonne vertébrale solide à ce géant de coton, la batterie dirige la marche sur un rythme puissant sans être agressif.                                  

Loin de ses bavardages habituels , la guitare souligne les passages les plus enjoués , ponctue ces discours charmeurs de quelques notes nébuleuses. Vient ensuite, le temps de l’intermède plus terre à terre placé au milieu de love suprem, un blues mélodieux entretenu par le dialogue nostalgique de la guitare et du synthétiseur. L’ombre de musique plus terrestre plane régulièrement au-dessus des fresques paradisiaques de cet Adam and Eve. Au détour d’un nuage symphonique, une guitare slide joue la country d’un paradis perdu. Puis viennent ces grandes envolées lyriques, lointains échos de la nostalgie de dark side of the moon.

Dans ses meilleurs moments, une chorale céleste retrouve le charisme poignant de the great gig in the sky. L’ombre du Floyd s’impose encore quand un synthé bucolique chante un folk d’un autre monde. Cosmic circus est un poème musical digne de wish you where here, un intermède de trois minutes que l’on voudrait prolonger à l’infini. Vient ensuite le rythme martial de vampire view , riff sombre semblant annoncer l’assaut des cavaliers de l’apocalypse.

Il y a du Genesis dans cette tension dramatique, Roine Stolt prenant une voix de chanteur d’opéra rock que n’aurait pas renié Peter Gabriel. Lors de ces huit minutes, le rythme passe alternativement d’une marche militaire à une douce lamentation symphonique, les instruments décollent ensuite sous l’influence d’un orgue solennel. Le rock s’élève ensuite au-dessus de cette ascension angélique, guitare et basse terminant le bal dans un déchainement hard rock. Le piano de day go by ramène un peu de calme, sa mélodie baroque ouvrant la voie à une nouvelle symphonie paradisiaque.

Cette contemplation sera de courte durée, une débauche électrique s’empressant de nous ramener sur les rives plus terre à terre de l’acid rock. Cette puissance plus simple ouvre la voie à des récits plus triviaux. C’est ainsi que Adam and Eve nous compte le péché originel avec une gouaille Rabelaisienne, la brutalité de son rock semblant exprimer la violence de ce coït interdit. Ceux qui affirment que Roine Stolt ne sait pas jouer de riffs devraient écouter ce déluge, le dialogue guitare synthé ressemble à un tonitruant croisement entre Birth Control et Deep Purple.

Starlight man est plus quelconque, sa mélodie pop ressassant les vieilles recettes de stardust we are . Le riff clôturant cet intermède est toutefois assez lumineux pour que cette bluette ne laisse pas un mauvais souvenir. Roine Stolt ouvre ensuite timeline sur un tempo digne des grandes heures de Chicago. Synthé et violons emportent progressivement ce mojo tranchant vers des contrées plus lunaires. Le blues a toujours fait partie de l’ADN du rock progressif, les musiciens de Pink floyd ayant d’abord choisi son charisme sophistiqué pour faire oublier leur passé de mauvais bluesmen. On ne s’étonnera donc pas de voir ce qui était au départ un blues aussi bien exécuté que quelconque décoller naturellement grâce à une série de solos Gilmouriens.

Timeline se clot sur un déluge où guitare heavy et clavier paranoïaques réaffirment que le heavy métal n’a pas le monopole de la puissance sonore. Adam and Eve se termine avec un driver seat dans la plus pure tradition du progressisme des années 70. Dans cette lignée traditionnelle, blade of gain referme le rideau sur une pop aussi anecdotique que sympathique.

Sans être révolutionnaire, Adam and Eve est assez varié pour compter parmi les belles réussites des Flower kings. Si il n’invente pas la poudre , le groupe continue de donner vie à une certaine idée de la grandeur musicale.           

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