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samedi 27 mars 2021

nouvelle rock detroit 6

 


Après le ravageur chant du cygne stoogien , Bowie vint rejoindre Iggy backstage. Les deux hommes s’étaient déjà rencontrés lors d’une soirée historique , où Iggy se fit photographier en compagnie de Bowie et Lou Reed. Si cette photo ressemble aujourd’hui à une icône représentant l’âge d’or de l’avant-garde seventies, Iggy et Lou ne jouissait pas d’un niveau de popularité comparable à celle de leur ami anglais. Après le succès de Ziggy Stardust , tout ce que touchait Bowie semblait se changer en or. Alors il se mit à rembourser ce qu’il devait à celui qui l’a tant inspiré. Son travail de production sur « transformer » permit à Lou Reed d’obtenir un succès dont il ne pouvait même pas rêver avec le Velvet.

Les chœurs glam de David , alliés au jeu étincelant de Mick Ronson , firent si bien leur travail, que walk on the wilde side tournait en boucle sur toutes les radios. Cet hymne à la débauche, cette description crue du bas fond new yorkais, devenait ainsi aussi populaire qu’une bluette des Beach boys. Bowie réussit avec Transformer à imposer la prose la plus subversive de Lou , sa production était le calice obligeant l’Amérique puritaine à avaler le rock toxique de Lou Reed jusqu’à la lie.

Quelques jours plus tard , Bowie était devenu fan d’un groupe de rythm n blues en pleine descente aux enfers. La sauvagerie de Mott the hoople n’avait rien à envier à celle des Stooges , mais elle était livrée avec plus de finesse. Dirigé par un poète rock fan de Dylan , le Mott était un wagon rock incapable de s’accrocher à une quelconque locomotive. Leur premier album laissait entendre un groupe de hard blues dans la lignée des swingin' sixties , mais cette époque était déjà mourante. Rendu inaudible par le hard rock, le premier essai du Mott atterri presque immédiatement dans les bacs à solde. Ne voyant dans cet échec qu’un coup du sort , le gang enfonce le clou avec mad shadow , sorte de rythm n blues proche des Who réarrangé  à la sauce américaine. 

Alors que le label island commençait à sérieusement se lasser de ces rockers inadaptés à leur époque, Mott the hopple décide enfin de changer de direction. C’est ainsi que, sous l’influence d’un psychédélisme se transformant en country rock , le Mott produit le bucolique wildlife. L’album est un chef d’œuvre, mais ne parvient pas à profiter du succès d’american beauty , sweatheart of the rodeo , et autres monuments terreux produit par d’ex hippie repentis.

Après un dernier album anecdotique, island décide finalement de laisser tomber cette cause perdue. Bowie refusant de laisser disparaître un tel groupe, il produit leur prochain album. Suivant à la lettre le schéma qu’il a lui-même inventé sur Ziggy Stardust , il aseptise un peu la violence rythm n blues du gang , met en avant le chant fascinant de Ian Hunter , et laisse Mick Ronson poser sa guitare sur ce nouveau classique. Pour porter l’album, il offre au groupe « all the young dudes », hymne ultime du glam, qui propulse Mott the hoople au niveau de Slade et autres superstars glam rock.

Il est donc évident que, si David se retrouve dans la salle où les Stooges effectuent ce qui doit être leur dernier concert , ce n’est pas par hasard. Lorsqu’il apprend que les Stooges viennent de se faire lâcher par Elektra , il donne rendez-vous aux musiciens au studio MCA, où ils pourront enregistrer un nouvel album. L’affaire commence mal, Iggy vient de virer les frères Asheton , et les auditions organisées pour leur trouver un remplaçant sont un désastre. Finalement, l’iguane rappelle les frères terribles de Détroit, avec qui il enregistre Raw Power en quelques jours. Cette rapidité est surtout due au fait qu’Iggy a réussi à obtenir une liberté de création totale. Les dirigeants de CBS ne savent donc pas ce qui s’enregistre dans leurs studios.

Le jour de l’avant première , le responsable de CBS poussa un cri terrifiant , à mi-chemin entre un coq brulé au troisième degré et un chat castré à vif. Il se mit à hurler « Ces abrutis vont couler ma boite ! » , « CBS ne survivra pas à une telle horreur ! » Alain  avait beau essayer de lui expliquer l’importance de cette hargne brute, l’influence qu’aurait une telle bombe électrique, l’entrepreneur ne put que hurler un dernier appel à l’aide « Bowie sauve nous ! »

Le golden boy anglais accepta donc de remixer Raw Power, mais il n’avait pas assez de marge de manœuvre pour réellement transformer ce déchainement de haine en succès pop. Iggy refusait de réenregistrer la moindre partie  d’un album qu’il considérait, à juste titre , comme son chef d’œuvre. Bowie dut donc se contenter de mettre le chant très en avant, celui-ci était toutefois si violent, que ça n’adoucissait en rien la puissance de l’album. Comme prévu , le troisième monument stoogien fit un four , CBS lâcha donc le groupe , et Iggy partit se désintoxiquer dans un hôpital psychiatrique.

De son coté, Alain retourna à Detroit, où il écrivait quelques articles pour des magazines locaux. Les Stooges lui avaient redonné la foi, et il était convaincu que Détroit n’avait pas poussé ses derniers cris.   

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