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jeudi 20 février 2020

Bob Dylan's dream : Episode 2

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Dylan est donc arrivé au studio Columbia, où John Hammond l’observe avec attention. Il faut dire que, en plus de Carolyn Hester, un cador du label est venu lui chanter les louanges du « gamin venu du Minnesota ».

Ce jour-là, Johnny Cash trainait par hasard au Gaslight , et découvrit pour la première fois celui dont la notoriété ne faisait que croître à New York. Le début du concert était un peu bizarre. Le jeune homme amusait le public en maudissant une guitare, qu’il accordait avec difficultés. Sur ses reprises de folk/ blues, il se dandinait comme un pantin burlesque.

Mais Dylan avait cette voix , si mature pour un jeune homme de son âge, et dont le phrasé si juste fut éblouissant quand il attaqua « in my time of dyin »

« In my time of dyin
Don’t want somebody to moan
All I want for you to do
Is take my body home
Well , well , well , so I can die easy »

Ce gosse avait à peine l’âge de quitter les jupons de sa mère, et pourtant il chantait ce blues mieux que la plupart des braillards pathétiques qui tentaient de se faire une place au soleil. C’est après cette soirée que Cash s’empressa de contacter John Hammond.

« Il y’a un petit gars en ville qui se débrouille pas trop mal. Tu devrais le signer avant qu’un autre ne le fasse. Il s’appelle Bob Dylan. »

Hammond n’eut pas le temps de répondre, son interlocuteur avait déjà raccroché. Il n’avait pas besoin d’en dire plus, que Cash se dérange à cette heure pour lui parler de Dylan en disait déjà long sur le potentiel du garçon. Aujourd’hui, Carolyn Hester lui apportait ce petit prodige sur un plateau, et Hammond pouvait ressentir son charisme.

Après lui avoir demandé de jouer un titre, qui s’avéra être celui que Johnny Cash avait entendu la veille, John Hammond lui proposa rapidement un contrat d’enregistrement. Le premier album qui en découla fut enregistré rapidement, et était surtout composé de reprises. Il constituait un manifeste puriste, le point de départ d’un artiste qui revendique ses racines avant de les dépasser.

Le disque ne se vendra pas bien, il était bien trop traditionnel pour ça. Sa force ne se trouvait pas dans la beauté de mélodies alambiquées, mais dans ce phrasé, à mi-chemin entre ses ancêtres folk et les rêveurs de la beat generation.

A une époque où Londres réinventait la pop, ces chansons acoustiques faisaient fuir une jeunesse plus tournée vers l’avant garde. Rapidement surnommé l’aberration Hammond, ce bide fit de Hammond la risée du music business, qui pensait que l’homme avait fait son temps.

Aussi limité fut-il, le public folk qui acheta le premier disque de Dylan lui offrit une sécurité financière qu’il n’avait jamais connu. Le chanteur en profitait pour soigner son apparence, passant des heures dans les boutiques, pour trouver le look le plus « authentique ». Il n’était pas qu’un opportuniste, même si il savait que le folk était le tremplin qu’il cherchait, pour imposer son image au côté des grands poètes qu’il vénérait.

Sa petite notoriété lui permis aussi d’être suivie par un homme en costard , qui cherchait désespérément à entrer en contact avec lui. A cette époque, Dylan commençait seulement à bouleverser les codes du folk, ses textes faisant preuve d’une profondeur inédite.
Grossman cherchait un artiste capable de produire une « folk grand public », une musique aussi attirante que la pop , mais dotée de cette authenticité qui fait les œuvres intemporelles. Dévoilé ce soir-là , « a hard rain is gonna fall » montrait un artiste sensible aux angoisses de son temps, et les exprimant avec une sensibilité poétique inédite. 

«  Oh were have you been, My blue eyes son ?
Where have you been my darling young one ?
I’ve walked and I’ve crawled on six crooked highway
I’ve been out in front of a dozen death ocean
I’ve been ten thousand miles in the mouth of a graveyard
And it’s a hard , It’s a hard , It’s a hard
It’s a hard rain gonna fall »

Lorsqu’il chantait ces mots , Dylan avait l’aura fascinante d’un messager de l’apocalypse. Quelques jours auparavant, Fidel Castro avait accepté que les russes installent leurs missiles sur les côtes Cubaines, à quelques encablures de son « ennemi impérialiste ». 

Heureusement, les russes n’étaient pas encore prêts à lancer une troisième guerre mondiale, et la crise prit fin après les menaces de Kennedy. Mais tous étaient désormais conscients que les deux supers puissances avaient les nerfs à vif, et qu’il suffirait de pas grand-chose pour que l’une d’elle appuie sur le bouton atomique.

Quand il réussit enfin à approcher Dylan , Grossman ne met pas longtemps à devenir son manager.


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