En 1977 , Lou est enfin le maître du monde. Les disques du velvet sont ressortis, et ont donné leurs vocations à une meute de musiciens à crêtes. Mais leur leader n’était plus là pour mener la charge , il était trop occupé à récolter les fruits de son rock gentillet.
Pourtant, Lou n’a pas changé,
il picole toujours dangereusement, et nourrit sa muse en visitant les clubs
sado maso. Ces virées nourrissent une prose plus acerbe, un humour maladif qui
explose enfin sur Street Hassle. Aussi radical qu’il soit, le disque ravit son
nouveau label.
Même les producteurs ont
compris que l’époque n’était plus au romantisme doucereux si bien mis en
musique sur cosney island babie. Incarnée par les sex pistols , l’époque était
au cynisme , et il était temps que le maître renvoie les jeunes loups à leurs
disques du velvet.
Reed dit lui-même que
Street Hassle est son meilleur album, celui qui est le plus proche du vrai Lou
Reed. Dès l’intro, il semble défigurer son héritage, donnant au riff de sweet
jane un riff tranchant soutenant un titre chargé de perversion libidineuse.
Cynisme et rancune sont les deux piliers de ce disque, et c’est évidemment les
journalistes qui sont les premiers visés.
C’est plus précisément «
les gens comme eux, qui mangeraient de la merde si on leur disait que c’était
bon », qui lui inspire une relecture toxique du « i fought the law »
de Bobby Fuller.
Puis vient le point d’orgue
du disque, la splendeur de la poésie Reedienne compilée dans un grand requiem
subversif. Véritable pièce en trois actes, « street hassle » fait
revivre la noirceur de Berlin, sur un crescendo orchestral poignant. Lou Reed
montre une nouvelle fois la triste mentalité des salopards peuplant les bas-fonds
New Yorkais.
Mais il semble se sentir
coupable de livrer un récit aussi cru, comme si il ressentait de la sympathie
pour cette pauvre fille entrainée dans un enfer sans issue. Son parcours lui
inspire une conclusion pleine d’empathie, qui ne fait que renforcer la puissance
de sa fresque symphonique.
« You know some people got no choice
And they can never find a voice
To talk with
That they even call there own
So the first thing that they see
That they allow them to be
Why they follow it
You know it’s called bad luck »
Après ce choc, Lou
revient au rock n roll. « I wanna be black » fera scandale, une
partie du public ne comprenant pas le second degré de ce rock cadencé, qui se
moque des clichés entourant les afros américains. *
Le bal des rancunes se
termine sur le riff lourd et agressif de « leave me alone » , avant
que wait ne ferme le rideau sur une note plus légère. Les punks peuvent disparaitre,
Lou a lui-même produit l’aboutissement de ce qu’il a entamé quelques années
plus tôt.
Après une tournée magnifique,
immortalisée sur le grandiose « take no prisonner », Lou entre dans
une période plus compliquée.
Sorti en 1979 , the bells
était déjà critiqué par ses musiciens lors de son enregistrement. Le disque
semble abandonner toutes les composantes de sa musique, pour produire une
espèce de be bop synthétique bancal. Au milieu d’une musique brillamment jouée malgré sa platitude , Lou semble chercher sa voie. Il a travaillé un chant plus
intense, et pousse sans cesse sa voie pour donner un effet de grandeur à une
musique manquant de souffle.
Le constat est encore plus
cruel sur l’album suivant, « growin up in public » , où Lou semble
essayer de s’approcher de la ferveur d’un Bruce Springsteen. Il ne réussit qu’a
la caricaturer, et donne l’image d’un musicien perdu dans une époque qui n’est
plus la sienne.
Il a compris qu’il n’est
plus le héros de son temps, il ne sera plus jamais un jeune avant gardiste non plus.
Il lui faut trouver une nouvelle voie.
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