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mercredi 8 avril 2020

Lou Reed : The image of the poet in the breaze partie 8


The Blue Mask" - Lou Reed - Rock Fever

Quelques jours après le succès de street hassle, Lou est devenu un habitué de CBGB. Ancien haut lieu du blues, le bar a vu défiler Patti Smith , television , les stooges , tous ces musiciens qui ne seraient rien si le premier velvet n’était pas sorti. Lou est surtout impressionné par les voidoid , seul groupe qui semble capable de se réapproprier la classe minimaliste de son premier groupe.

A la guitare, Bob Quine est un digne descendant de Wilco Johnson , dont il a récupéré le jeu tranchant. Quand Quine et Reed se retrouvent, en 1981, Lou est devenu un has been en quête d’un second souffle.

Nous sommes le 30 mars, Reagan a failli finir comme Kennedy, et Lou prépare sa résurrection. Lui et Quine ont les mêmes références, la même vision de ce que doit être le rock. Lou annonce vite son souhait de créer un nouveau groupe.

« J’ai laissé tomber la guitare sur mes deux derniers albums, c’était une erreur. »

Quine n’ose pas l’interrompre, il se doute de ce qui va suivre, et ne voudrait pas gâcher cette consécration.

«  Le disque que je prépare va montrer aux poseurs actuels ce qu’est la guitare rock. Mais il me manque une seconde gâchette, ce sera donc toi. »

Ce n’était pas une demande, c’était la concrétisation de la symbiose qui est née quand les deux hommes ont commencé à jammer ensemble. A l’époque, Bob Quine accordait sa guitare un ton plus bas, ce qui lui permettait de développer un toucher très différent de celui de Lou, sans empiéter sur son jeu. C’était comme si leurs accords se complétaient naturellement, chacun développant sa virtuosité dans les espaces laissés par l’autre. 

Cette symbiose booste la créativité de Lou Reed, et lui permet de retrouver la finesse mélodique qu’il avait sur les deux derniers albums du Velvet. The blue mask est enregistré en quelques jours et, pour annoncer sa résurrection, sa pochette est celle de transformer teinte en bleu. 

Le poète décadent et nihiliste est devenu un observateur attristé par la violence de son époque (the day john kennedy die) , un réveur romantique ( women, my house) , et un rebel à la plume acerbe (average guy). Sa guitare n’a jamais si bien sonné que sur ce disque. Elle illumine les rêveries de my house et heavenly arms, et redonne au rock ses lettres de noblesse sur average guy.

Alors que les disques du Velvet commençaient à bien se vendre, Lou Reed prouvait qu’il avait encore de belles choses à dire. On regrettera juste que son narcissisme l’ait poussé à masquer les parties de guitares de Quin derrière les siennes, nous laissant ainsi fantasmer les fantastiques duels rythmiques qu’auraient pu être les titres les plus rock. 

Ce bricolage n’empêchera pas le guitariste des Voidoids d’apparaitre sur l’album suivant. Issu du même moule, legendary heart développe ce groove rêveur avec la même classe. Les deux disques sont les derniers chefs d’œuvre de Lou avant un nouveau passage aux oubliettes. Censé clore ce chapitre flamboyant, le live en Italie est un fiasco. Obligé de jouer sur des guitares mal accordées, le groupe y massacre tous ses titres. Ce fiasco annonce une décennie artistique calamiteuse. 

Les années 80 le voient incarner le rock n roll avec classe sur "New Sensation" , mais l'album confirme aussi le fait qu'il fait désormais partie du passé. Les boîtes à rythme ont beau faire leurs apparitions sur plusieurs titres , ce groove est celui de Chuck Berry , Eddie Cochran , tous ces pionniers ayant guidé ses premiers tâtonnements.

Les années 80 avaient délaissé le rock , et Lou restait là pour garder le temple. Il se paiera tout de même deux derniers barouds d'honneur, Song for Drella et magic and loss. Le premier est une véritable biographie musicale de Warhol , un requiem dédié à son Pygmalion disparu. 

"Song for drella" était surtout le dernier chef d'oeuvre du duo Reed Cale, union au génie intemporel. 

"Magic and loss" réussit l'exploit d'atteindre la même splendeur nostalgique. Beaucoup le trouvèrent déprimant à sa sortie , mais cette nouvelle fresque baroque était au contraire pleine d'espoir. Après avoir rendu hommage à ceux qui sont partis , Lou abordait la mort avec la sérénité de celui qui a accompli sa mission. 


Now the coal black sea waits for me, me, me

The coal black sea waits forever

When I leave this joint

At some further point
The same coal black sea will it be waiting  
   
Après quelques albums anecdotique , la froide mer noire finira par l'emporter en 2013. Il laisse derrière lui une oeuvre monumentale et mal connue qu'il est urgent de redécouvrir. 

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