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vendredi 26 juin 2020

Jack White 2

2001 : les White Stripes débarquent en Europe et enregistrent deux ...

Le premier public des whites stripes est évidement celui de Detroit , cette scène que le duo fait entrer dans la modernité. Meg White agite ses baguettes comme des hochets , massacre ses toms avec le plaisir innocent du gamin tambourinant sur son tambour. Les rythmes sont basiques à souhait , ce bon vieux boom boom n’a été jamais joué avec une telle simplicité assumée. Seule la vitesse semble varier, le rythme s’emballe, se repose pour entrer dans une marche pachydermique , ou ménage ses échos venus du delta du Mississipi.

Dans le milieu underground de Détroit , on est fasciné par ce duo qui redéfinit le groupe de rock, tout en sonnant aussi fort et dur que n’importe quelle formation locale. Un petit label indépendant propose vite au white stripes d’immortaliser cette énergie, qu’il ne publie au départ que sous la forme de single. C’est ainsi que sort « let’s shake hand », véritable déluge électrique de musiciens approchant du but, sans réellement le toucher. Le titre n’est pressé qu’à 1000 exemplaires, mais c’est suffisant pour démarrer une légende.

Dans la rédaction des premiers fanzines , on s’active pour propager la rumeur de ce renouveau rock. Le couple commence à apparaître vêtu de rouge et de blanc, et une sorte de bonbon trône sur ses photos, comme un symbole de la spontanéité de sa musique. Cette rumeur est nourrie par d’autres singles, que le groupe envoie à ses fanzines pour entretenir sa notoriété naissante.  Rapidement, son label se rend compte qu’il se passe quelque chose, et qu’il faut rapidement enregistrer un album pour passer à la vitesse supérieure.

Le disque éponyme sort donc en 1999, et est présenté comme un hommage à Son House. Comme son modèle, les whites stripes perpétuent le culte de la variation, de la même pulsation jouée à un rythme plus ou moins rapide. C’est le grand retour de la monotonie originelle , le mojo hypnotique doté d’une nouvelle splendeur. Le blues des White Stripes , c’est une frappe de mule sur laquelle la guitare vient balancer ses riffs pachydermiques. Chaque note vous secoue le cerveau avec une violence, dont l’écho reste longtemps imprimé dans votre mémoire.

Même « one more cup of cofee » , la ballade tzigane de Bob Dylan , est parcourue d’une agressivité, qui ne demande qu’à exploser dans une détonation destructrice. Le duo traite le titre comme deux tortionnaires retenant leurs instincts meurtriers. La frappe de Meg sonne comme le grondement d’une énergie menaçante, transformant la ballade en cauchemar mystique. 

L’album est schizophrène, le respect du passé y côtoie une violence qui semble vouloir le détruire. Et c’est encore le blues qui représente le mieux cet affrontement philosophique. Classique immortel du genre, John The revelator subit les pires outrages , son feeling étant magnifiquement massacré par un rythme destructeur. Le blues est ainsi lavé de ses vieux clichés , qui sont autant de barrières l’empêchant de renaître.  

Et puis, quelques minutes plus tard, « screwdriver » fait machine arrière, tant il semble inspiré de la ballade de ces grands martyrs noirs. Les white Stripes affirment leur indépendance tout en cajolant leurs totems, ils veulent représenter l’avenir sans faire oublier le passé.

Ce premier disque est bien plus qu’un simple hommage à Son House , c’est le blues réinventé pour un nouveau public. L’album n’est pas un succès, mais ses modestes ventes suffisent à justifier l’enregistrement quasi immédiat d’un autre disque.

De stijl sort donc quelques moins plus tard, mais le chemin parcouru est déjà impressionnant. Déjà arboré fièrement sur les couvertures des fanzines , le rouge et le blanc deviennent l’étendard du groupe. Sur la pochette, le duo sur joue sa légèreté enfantine, regardant l’objectif d’un air innocent.

C’est que ce second essai a jeté l’agressivité du premier, l’énergie est toujours là mais elle a changé de nature.  « you pretty good looking » annonce déjà la métamorphose en cours. La gravité du blues a fait place à une légèreté enfantine, la violence lourde à une énergie bienfaisante. Après avoir réinventé le blues, Jack White tisse ses mélodies, composant ainsi sa version musicale de citizen Kane.

Le minimalisme n’est plus seulement abrasif, il est aussi mélodieux. Apple Blossom et I’m bout to pack it up définissent une nouvelle vision de la folk , plus pop. Le traditionalisme folk vient donc compléter le tableau de chasse d’un duo qui brille en réinventant le passé. Le blues lui, n’a pas disparu , il suit l’évolution en cours. Comme nouvelle reprise, le duo choisit Death Letter , classique immortelle, que Mellenchamp réadaptera bientôt à la sauce bluesgrass.

Ce choix n’est pas un hasard, ce titre est calé sur un rythme sautillant, qui colle parfaitement à l’ambiance générale de De Stilj. Ce rythme, Jack et Meg vont en souligner la gaieté  dans une célébration rafraichissante.  Les white stripes se sont réappropriés le rock , ils fêtent ici son renouveau. Même quand le rythme s’alourdit , ce n’est que pour célébrer cette nostalgie, qui est le bonheur des gens tristes.

Cette gaieté n’est pas dénuée de verve, et jumble jumble, et hello operator , posent les bases du hard boogie version white stripes. La guitare ne hurle plus , elle chante , comme pouvait le faire Janis Joplin , Bon Scott , tous ces chanteur qui semblaient avoir l’énergie du monde dans leurs gosiers. Les tentations de rapprocher Jack des hard rockers vont commencer à se faire sentir, et elles ne feront que croitre au fil des années.

Sa dextérité est pourtant très éloignée des égarements bavards de Blackmore , et autres rainbow, elle renoue plutôt avec la retenue prônée par les punk. Si Jack plaque un solo, c’est dans l’urgence, et il l’arrête rapidement pour ne pas perdre l’efficacité de ses riffs.

Si les whites stripes sont si fascinants, c’est parce qu’ils tapent toujours sur le même clou , pendant le même temps , mais de plusieurs façons différentes. Ce qui est à la fête, à travers ces beat binaires, ces boogie enjoués , et ces folk pop , c’est le rock n roll des grands épicuriens.

C’est la joie simple contenue dans Johnny be good sweet little sixteen, et jailhouse rock . Depuis plus de trente ans , on en revient toujours là , mais de tant de façon différente.    

De stilj fait naître les whites stripes dans ce qu’ils ont de plus excitants . Ce disque, c’est le triomphe du minimalisme, un rock dénué de fioritures mais pleins d’ambition. Nous sommes en 2000 , et cette fureur est sur le point de sortir de Détroit pour déferler sur le monde.
                                          

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