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lundi 24 août 2020

Johnny Winter 7

John Dawson Winter III - Wikipedia

 Pendant que son frère se prend les pieds dans son tapis glam, Johnny Winter atteint le but ultime de nombreux rockers, sonner comme un nouveau Chuck Berry. Depuis trois ans, notre albinos a joué un rock , funky , country , bluesy , hard rock , et voilà qu’il se contente de jouer du rock n roll. Rock n Roll people c’est johnny be good et shakin all over dans le même morceau, le summum de l’énergie juvénile des fifties. Johnny Winter est le seul à pouvoir ouvrir un titre sur un telle déluge électrique, sans s’égarer dans un grand délire Pagien. Cet homme retombe toujours sur la rythmique comme un chat retombe toujours sur ses pattes, c’est un réflexe naturel.

Ajoutez à ça les riffs de pick up my mojo et sweet papa john , et vous obtenez un swing à rendre jaloux le grand Chuck en personne. Les cuivres n’ont pas tout à fait abandonné la partie , et « lay down tomorrow » les voient offrir à Johnny la classe grandiloquente du King sur la scène de Las Vegas. Johnny n’a plus chanté comme ça depuis son second album, sa voix mélodieuse s’envole au milieu de chœurs beaux à pleurer.

Comme un clin d’œil à ses petits frères sudistes , Johnny fait un petit détour sur les terres de la country et du blues, les deux mamelles nourrissant l’armée levée par Lynyrd Skynyrd. Passé ses petites diversions , John Dawson Winter sonne comme un juke box abandonné au fond d’un vieux club. Chaque titre pourrait faire partie d’une compil de tubes des années 50 , ils ressuscitent une formule que les stray cats ne feront que parodier.

Regardez le notre albinos, son allure martiale de lord anglais, cintré dans un costume de monarque. John Dawson Winter est plus qu’un énième album de rock n roll, c’est un coup d’état. Pour être digne de jouer du rock n roll, il faudra désormais se rapprocher de ce modèle tonitruant. Dans le sud, tout le monde s’y plie, et l’écho de cette musique finit même par atteindre les côtes anglaises. Nuthin fancy , Point Blank , Tres hombres , et plus tard Molly Hatchet et Strike , chaque disque sudiste est un assaut envahissant le monde du rock. A la tête de ces rednecks déchainés, John Dawson Winter a lancé la charge la plus sanglante.

Pendant que son frère devient l’incarnation du rock n roll, Edgard Winter dissout son Edgard Winter group. C’est donc sous son propre nom qu’il sort, en 1975, Jasmine Nightdream. Les temps ont déjà changé, Bowie a suicidé son héros glam , et les Dolls annoncent la future invasion punk. Quelques rares survivants, comme Mott the hoople , tentent de maintenir la flamme vacillante du glam rock , mais la résistance ne durera que quelques mois. Loin de suivre les évolutions du rock Anglais, Jasmine Nightdream fait le bilan du riche parcours d’Edgard.

 En ouverture, la mélodie Jazzy de one day tomorrow renoue avec la beauté cuivrée d’entrance. Little brother sonne ensuite comme un funk rock électronique, et ses mélodies dansantes flirtent une nouvelle fois avec la folie futuriste d’un Todd Rundgren.

Le synthétiseur est devenu l’instrument de prédilection d’Edgard, celui qui donne au disque cette allure de spleen martien. Revenu de ses glorieux exploits en compagnie d’Alice Cooper et de Johnny Winter , Rick Derringer apporte la puissance sonore qui évite au disque de s’engluer dans ses excentricités synthétiques. 

Sur Hello Mellow Feelin , ses solos puissants et mélodieux tissent un blues langoureux à grand coup de riffs poignants. Shuffle low laisse ensuite la guitare se déchaîner sur une batterie funky digne de white trash. Le rythme accélère lentement, et atteint son paroxysme sur un instrumental qui sonne comme un clin d’œil à ZZ Top. On ne peut alors que penser à la puissance orgiaque de la grange, quand les solos affutés s’élancent sur la rythmique, comme une charge de bisons.  Prolongeant le durcissement entamé sur le titre précèdent, Keep on brunin pourrait donner des leçons de heavy rock à Bob Seeger.
                                        

On regretterait presque que la mélodie reprenne ses droits, que le clavier pousse la guitare rageuse au second plan. Le synthé se joint alors au chœurs soul de « how do you like to love » , et le tout groove comme une discothèque installée dans le cosmos. Loin d’être endormi par cet apaisement, Rick Derringer se tient en embuscade, sa guitare offrant quelques fulgurances à l’auditeur attentif.

Jasmine Nightdream réussit ce que son prédécesseur avait si lamentablement raté , faire cohabiter toutes les influences de son créateur. Funk , Pop avant gardiste , Rock , blues , tout cela se mélange dans un album unique, pour célébrer les noces du swing et du groove.

       

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