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jeudi 31 décembre 2020

Tangerine Dream : Atem


Si Edgard Froese a toujours refusé d’être associé au rock , c’est sans doute à cause de ce concert à Bayreuth. Quelques jours plus tôt , le trio avait repris ses guitares basses et claviers , pour livrer un ultima thule, qui dû ravir les fans de rock planant. Les enfants terribles de la musique cosmique s’abaissaient enfin au niveau des derniers hippies avides de paradis artificiels. Le virage est d’autant plus profitable que, alors qu’elle naissait à peine à leurs débuts, la scène planante allemande est en plein âge d’or.

Yeti , Tanz der lemming ,  Tago Mago , Kanguru , les psychotropes auditifs poussent dans les bacs des disquaires , comme une magnifique légion de champignons hallucinogènes . C’est donc sans doute après avoir entendu son dernier titre , plus proche de l’ère du temps , qu’un groupe rock de Bayreuth décida d’embaucher Tangerine dream en ouverture de son concert.

Arrivé sur place, le trio installe l’attirail électronique qu’il a lui-même conçu, et part dans ses expérimentations assourdissantes. Face à eux, les mangeurs de choucroutes planantes ne semblent pas apprécier cette cacophonie stridente. La foule commence à gronder comme une bête enragée, mais les musiciens sont trop concentrés sur leurs expérimentations pour s’en rendre compte. Exaspérés, ces amateurs de paradis artificiels, ces rockers se détruisant le cerveau à coup de substances toxiques bombardent les musiciens … De bouteilles de jus de pommes !

Déstabilisé par cet attentat fruitier, le rêve d’orange devient un cauchemar sentant la pomme, et les responsables de ce courroux doivent fuir la Francfort entre les jambes. La lutte n’aura duré que 15 minutes. Dégouté par cette débâcle lamentable, le promoteur appelle la police pour faire fuir ces fous à lier. Le groupe ne parvint même pas à se faire rembourser l’essence utilisée pour se rendre sur le lieu du concert. La France sera heureusement plus accueillante.

Ce soir, là, après ses nombreuses expérimentations électroniques, le groupe semble être devenu maître des éléments. Sur la scène, des images fantastiques semblent raconter un âge d’or fantasmé, saluer la beauté d’un Atlantide perdu. Véritables surhommes tels que Nietzche aurait pu les imaginer, Tangerine dream manie des machines ayant l’allure d’objets sacrés. La musique qu’il en tire coule, limpide comme une eau capable de liquéfier la roche. A travers ce torrent se déverse un océan d'émotions et d’images, une beauté mystique et fascinante plongeant le public dans une rêverie magnifique.

Les spectateurs sont déchirés par l’orage, se laissent purifier par la pluie, les musiciens qu’ils écoutent sont des dieux les emmenant dans leurs décors. Et puis la connerie la plus vulgaire fit irruption au milieu de cet océan de sagesse.

Pour montrer leur colère, les babouins lancent leurs déjections sur leurs opposants. Cette fois ci, le primate qui interrompit cette méditation envoya un plein sac de marmelade, fiente confite sucrée comme un diabétique obèse, sur le clavier. La protestation la plus vulgaire, la violence la plus barbare, vient toujours à bout de la fragilité d’un artiste en pleine création. Pour résumer la situation, on peut dire qu’un con sachant viser va parfois plus loin qu’un intellectuel sans protection.

Le sachet répand donc son écœurant contenu sur la précieuse machine d’Edgard Froese, qui ne peut que regarder la substance s’incruster dans les creux autour des touches. Les métastases confites atteignent rapidement le cœur de la machine, qui meurt vite de ce cancer sucré. Malgré l’incident, le public retiendra que, pendant quelques heures, Tangerine Dream a atteint le sommet de son art.

Revenu de ses émotions contradictoires , le trio enregistre Atem en 1973. Dès sa pochette, représentant un enfant sortant d’un œuf coloré, ce disque annonce une musique très éloignée de Zeit.  Pour son enregistrement, Edgard Froese a testé un système de prises de son en quadriphonie. Bientôt testée par les Who , cette technique lui permet d’inclure plus d’instruments , dont les percussions, qui éloignent Atem des monolithes sombres de son prédécesseur. Après ses premiers albums, certains reprochaient à Tangerine dream son bruitisme , son absence de structure musicale étant comparé à un monstre sans colonne vertébrale. Mais ce n’est pas parce que certains ne comprennent pas une logique qu’elle est absente.

D’ailleurs, la musique d’Atem ne se comprend pas , elle se ressent. Si Zeit vous fixait des œillères déprimantes, vous immergeait au fond d’un océan de tourments merveilleux, Atem vous sort de ce bain glacial à grands coups de visions lumineuses. Atem vous ouvre les yeux sur un monde lumineux , vous berce d’images rassurantes et de rythmes rêveurs. Comme ce bébé, vous avez l’impression de découvrir le monde pour la première fois, et celui-ci à la chaleur de parents saluant votre naissance. Il y a, dans ces mélodies charmeuses, dans ces percussions formant des mantras hypnotiques , ou célébrant des messes saturniennes , quelque chose qui vous fait renaître .

Dans les passages les plus méditatifs, le mellotron souffle comme une brise gracieuse et Genesis n’a jamais atteint la beauté féerique de ce grand final aux airs champêtres. Ce qui émerveille autant, dans ces ambiances aussi légères que complexes, c’est justement ces sons se succédant comme d’heureux événements, guidés par un hasard merveilleux.

L’homme a besoin de repères. Tout phénomène doit, selon lui, avoir une explication. Pour ce que la science n’a pas encore réussi à expliquer, il a trouvé dieu, triste canne sur laquelle il s’appuie quand une peur le déséquilibre. Si Huxley a écrit « les portes de la perception » pour protester contre ces visions rationalistes et dogmatiques du monde, tout en décrivant les effet du LSD , son raisonnement s’applique parfaitement ici. Je conclurais donc cette chronique en m’inspirant de son livre culte.

Atem crée sa propre conception de la beauté musicale, détruit tous les repères qui formaient la culture du mélomane. Plongé dans ce bain de sonorités  apparemment illogiques , l’auditeur est prié d’oublier tout ce qu’il sait. Débarrassé de ses vieilles notions, il commence à ressentir les bienfaits de cette musique, à méditer rêveusement sur ces décors. Ayant retrouvé son innocence d’enfant, la musique lui apparait de nouveau telle qu’elle est, infinie et sans limites. Et le mélomane peut de nouveau pousser son premier cri d’extase.            

mercredi 30 décembre 2020

tangerine dream : electronic meditation


Pour comprendre tangerine dream , il faut d’abord se pencher sur l’histoire d’Edgard Froese. Né en Russie , il apprend d’abord à jouer du piano , avant de s’intéresser à la peinture et la littérature. Dès son plus jeune âge, ces disciplines cohabitent dans son esprit, au point qu’il ne met pas réellement de barrière entre elles. 

Qu’il s’exprime par l’écriture, la peinture, ou la musique, l’homme créatif se met toujours au service de cette expression du génie humain qu’est l’art. Séparer ses composantes, traiter la peinture, la littérature, et la musique comme des entités distinctes et irréconciliables , est pour lui une simple preuve de fainéantise intellectuelle. D’ailleurs, alors que les sixties sont l’âge d’or du rock, Edgard ne se voit pas forcément devenir la nouvelle poule aux œufs d’or d’une industrie du disque florissante. 

Il a bien sur entendu et apprécié Hendrix , Pink floyd , et Cream , il a conscience que ces artistes sont les phares d’une musique explorant tous les territoires , mais ces musiciens lui paraissent encore trop limités. C’est donc la peinture, sous les traits de Salvador Dali, qui lui montrera le chemin qu’il cherche. Le peintre le plus connu du surréalisme l’a déjà invité à plusieurs de ses performances artistiques, et pense naturellement à lui pour composer la bande-son accompagnant sa dernière création. Composé de barils de métal, et de vieux vélos, sa statue du christ devra malheureusement trouver un autre fond sonore.  

Trop porté sur l’expérimentation, Froese ne parvient pas à réunir des musiciens capables de donner vie à la musique qu’il souhaite offrir à son illustre commanditaire. Il s'exile alors en Allemagne, où le traumatisme du nazisme semble avoir poussé la jeunesse vers des sonorités hypnotiques, des rêves sonores fascinants. 1968 marque le début de cette fuite des réalités. Assommés par la découverte du premier album du Velvet , une bande de virtuoses allemands tentent d’oublier leur solfège , pour retrouver l’énergie primaire du groupe de Lou Reed. Ils se nommeront Can , et Amon Dull et autres Guru guru viendront bientôt grossir leurs rangs d’allemands traumatisés par la découverte de la musique américaine et anglaise.

Pour Froese , l’Allemagne sera une formidable terre d’accueil , où il réunit une première version de Tangerine Dream dès 1968. Le groupe commence à se produire à Berlin, où il croise la crème de l’underground mondial , comme Frank Zappa ou les Fugs. Cette première incarnation de tangerine dream ne produira aucun disque, seul un album live se vend à prix d’or chez les bootlegers.

Tangerine dream ne naît vraiment que quand Edgard Froese croise la route de Klaus Shultz et Conrad Schnetzer. Le premier est un percussionniste qui souhaite s’échapper du boom boom prévisible imposé par le succès du rock. Conrad, lui, a suivi des études d’art, et s'est fait remarquer en produisant une musique expérimentale avec toute sorte d’ustensiles non musicaux. Le trio s’enferme dans une usine de Berlin, où il enregistre une suite expérimentale nommé « electronic meditation ».

Personne ne sait comment une musique aussi aventureuse, a pu se retrouver sur le bureau du gérant d’une des plus grandes maisons de disques allemande, toujours est-il que ce qu’il entendit lui plu. Etonné par sa proposition de publier ses bandes, Edgard Froese complète son œuvre avec quelques parties de guitares et d’orgue, et le disque sort en 1970.

Ecouter electronic meditation , c’est être happé par une musique qui vous impose ses images. D’abord, les violons partent dans un cérémonial tribal, la batterie et les sifflements d’une espèce de flûte astrale rendent hommage à un dieu païen. Il y a quelque chose de mystique dans le fond sonore entretenu par les musiciens , c’est le bas fond d’où l’orgue s’élève vers des sommets stratosphériques. 

Electronic méditation ouvre les portes d’un univers à explorer, il représente le premier astre d’une galaxie que le groupe ne cessera d’enrichir. Cette musique est une véritable toile sonore, un tableau fait de sons , et dont on ne se lasse pas de redécouvrir les détails.

Espace lunaire, grandiose prison aquatique que la batterie vient parcourir d’impacts de météorites rythmiques , fusée futuriste qu’une guitare vaguement Hendrixienne envoie sur orbite, les images suggérées par cette musique sont fascinantes. Dans cette atmosphère, la guitare électrique peut aider le rocker à ne pas se noyer dans des eaux qu’il peut trouver hostiles. 

Il faut pourtant qu’il lâche prise, qu’il laisse ce torrent de rêves l’emmener loin des terres qui lui sont familières. C’est à ce prix qu’il pourra dépasser ses limites culturelles, pour se mettre à la hauteur de l’œuvre qu’on lui propose. Qu’il se rassure, la récompense qu’il obtiendra justifie largement qu’il consente à ce petit sacrifice.             

mardi 29 décembre 2020

Tangerine dream : Live at Victoria palace


A une époque où la drogue était encore vue comme un moyen d’évasion, la musique de Tangerine Dream devient les psychotropes favoris du vieux continent. La première tournée mondiale du trio fut un triomphe, l’époque où le groupe se faisait lapider par les rockers parait déjà loin. En ce mois de juin 1974, tangerine dream conquit même l’Angleterre, capitale mondiale de l’avant-garde pop.

Les anglais ont réellement pris goût à la musique cosmique quelques années auparavant, lorsque Pink Floyd partit visiter la face sombre de la lune. Grande réflexion musicale sur la mort, le temps qui passe, notre place dans l’univers, dark side of the moon ouvrit la voie à une série de délires atmosphériques. Musique futuriste et rêveuse, l’électro de Tangerine dream est faite pour combler les désirs d’évasion de la jeunesse anglaise. 

Le trio arrive donc au Victoria Palace , où il doit donner un concert en cette chaude soirée de juin 1974. Vue de l’extérieur, la salle a des airs de cathédrale, son toit trônant à une hauteur faisant passer les autres bâtiments pour des maquettes miniatures.  A l’intérieur, la salle se présente comme une version couverte des grands théâtres antiques. Dans ce décor, la musique de Tangerine dream déploie toute sa grandeur mystique.

Quand Tangerine dream démarre sa méditation électronique, de petits films sont projetés derrière lui. Ces images ne racontent pas d’histoires, n’imposent aucun rêve, se sont juste des stimulants incitant le public à se laisser porter par la musique. Live oblige, l’improvisation que le trio effectue ce soir-là est moins structurée que Phaedra. On retrouve tout de même ces vagues sonores, ces marées synthétiques montant et descendant en suivant le rythme de deux notes, répétées comme un mantra acide. Au milieu de ces marées , un synthétiseur siffle comme une machine futuriste. Et puis il y a l’homélie martienne de l’orgue, imposante bête régissant la vie de ces abysses, et coupant les derniers liens reliant l’auditeur à la réalité.

Tangerine dream a toujours assumé de ne jamais jouer deux fois la même chose, ses œuvres sont des mirages s’évaporant aussi vite qu’ils sont apparus.  Ce concert au victoria palace est donc une œuvre à part entière, mais elle ne sera exhumée que plus de 30 ans après sa création. Comme elle, combien d’improvisations , de morceaux d’histoire sont tombés dans l’oubli ? Aujourd’hui disponible en streaming, et dans un monumental coffret, le concert de Tangerine Dream montre comment un groupe d'explorateurs allemands a conquis la perfide Albion.   

vendredi 25 décembre 2020

Richard & Linda Thompson

Dans une année où j'ai écouté énormément de metal j'ai aussi beaucoup écouté le duo folk rock composé de Richard and Linda Thompson. Ils ont sorti 6 albums studios entre 1974 et 1982. Focus sur le plus célèbre duo de folk rock des années 70.




Mais revenons en 1967, Richard Thompson rejoint un groupe formé de Ashley Hutchings et Simon Nicol. C'est la naissance d'un  des plus grands groupe de ce qu'on appelle le Folk Rock Anglais, inspiré du folk américain et du passage à la guitare électrique de Bob Dylan. Ce groupe c'est Fairport Convention, d'abord avec Judy Dyble au chant sur le premier album, puis avec Sandy Denny par la suite. En 1969, après plusieurs changements de line up , le groupe sort deux albums qui vont les faire rentrer dans une autre dimension : Unhalfbricking, qui sera suivi par un dramatique accident sur lequel nous reviendrons plus tard et Liege & Lief. Sandy Denny s'en va former Fotheringay après la sortie cet album. Et Richard Thompson suivra début 71 après la sortie de Full House, le successeur de Liege & Lief pour poursuivre une carrière solo.


Linda Peters naît en 1947, de son vrai nom Linda Pettifer, elle rencontre Richard Thompson en 1969. A l'époque sa réputation de chanteuse la précède déjà. Mais elle et Richard n'enregistreront rien ensemble avant 1972 qui est aussi l'année ou ils se marient. Ils resteront mariés 10 ans. Elle prend le nom de Linda Thompson professionnellement. En 1972, elle chante sur le premier album solo de Richard et sur l'album de The Bunch, un supergroupe formé des membres de Fairport Convention et qui reprend des standards du rock des années 50. Elle y est crédité sous le nom de Linda Peters.


Après ca, Richard et Linda décide de travailler ensemble à plein temps et en 1974 sort le premier album du duo Richard & Linda Thompson. Cet album c'est I Want to see the Bright Lights Tonight. Mais l'album passe inaperçu à la fois par la critique et par le public. Rétrospectivement cela à bien changé, l'album est unanimement considéré comme une des pierres angulaire du folk rock et c'est devenu aujourd'hui un classique. De nombreux morceaux de cet album ont été repris comme le morceau titre par Arlo Guthrie par exemple, D'autres morceaux ont été repris par Elvis Costello et Maria McKee.


Cet album contient déjà la marque de fabrique du duo a savoir des chansons folk rock articulées autour de la guitare (électrique ou acoustique jouée en hybrid picking) de Richard Thompson, excellent guitariste acoustique mais pour moi c'est en électrique qu'il prend toute sa mesure à la fois en rythmique et en soliste. Ses qualités de guitariste découvertes dans Fairport Convention ont aidé a posé les bases du folk rock. Richard et Linda se partage le chant, soit ensemble sur le même titre, soit séparément. Et la encore leur voix sont très différentes. Linda a une voix douce assez aérienne et Richard a une voix grave et moins mélodieuse. Un disque qui contient 10 morceaux excellents mais si on devait faire un choix on choisira le morceau-titre aujourd'hui encore joué sur scène par Richard ; Has he got a Friend for me, chanté par Linda ; When I Got the Border qui est le morceau d'ouverture et the Calvary Cross.


Dans ces années la le couple participe aussi en tant que musiciens de sessions aux albums de Fairport Convention et de Sandy Denny, histoire de ne pas oublier les copains.


En 1975, le duo va sortir deux albums, mais nous y reviendrons car juste après l’enregistrement de I want to see the brights Light tonight, Richard & Linda Thompson découvrent la religion et se convertissent à l'Islam (je ne sais pas ce qu'il en est pour Linda mais Richard est toujours musulman aujourd'hui) ce qui va les amener à faire des choix radicaux dans les années suivantes.



Donc en 1975 sort tout d'abord Hokey Pokey, excellent album dans le lignée de son prédécesseur mais un peu moins bon, à leur décharge il est difficile de passer derrière un album tel que I Want to see the Bright Lights tonight. Cet album n'est pas marqué par la conversion du couple à l'Islam. Et comme pour son prédécesseur les paroles ont des thèmes assez sombres : la drogue, le sexe, la dureté de la vie, la perte et le chagrin comme le titre Never Again, peut être le sommet de l'album écrite en 1969 suite à l'accident du bus de la tournée de Fairport Convention qui avait coûté la vie à Martin Lamble le batteur du groupe alors âgé de 19 ans. Un morceau très émouvant.





L'album suivant toujours de 1975 sera un tournant dans la carrière du duo. L'album qui suit intitulé intitulé Poor Down Like Silver. C'est l'album le plus électrique du groupe, la pochette représente Richard Thompson enturbanné, mettant en avant leur foi. Il faut savoir que le couple, à l'époque de la sortie de l'album a tout laissé tombé et est partie vivre dans une communauté soufiste dans l'est de l'Angleterre. On est pas là pour faire un cours de religion, de toute manière j'y connais rien mais le soufisme est un courant de l'Islam qui prône un islam ésotérique et mystique. Pendant 3 ans, le couple ne va plus donner signe de vie ou quasiment pas, Richard va arrêter la musique, comme le fera Cat Stevens en 1977. Mais en 1978 le duo fait son retour avec son 4 ° album : First Light.



C'est leur album le plus marqué par la religion, les paroles des chansons sont des traductions directes du Coran ou de textes soufistes et on sent des influences plus orientales dans la musique, mais on reste dans un folk rock assez classique. La qualité a baissé d'un cran par rapport aux albums sortis avant leur retraite. Cet album arrive à la suite d'une invitation faite a Richard de venir jouer sur l'album de Julie Covington, il y rencontre Willie Weeks et Andy Newmark, musiciens de session très réputés et ayant joué avec une multitudes d'artistes. Impressionnés par le jeu de Richard, ils souhaitent collaborer avec lui ce qui lui les poussent, Linda et lui a sortir de leur retraite et à enregistrer un nouvel album. Sur ce disque on retient en priorité le morceau Pavanne.


En 1979 arrive le successeur de First Light: Sunnyvista, disque beaucoup moins religieux et qui est probablement le disque le plus rock du duo, comme le prouve Civilisation, premier morceau du disque et sûrement le meilleur aussi. Ce disque est pour moi le plus faible mais il reste tout à fait honnête. Il faut savoir que depuis le début de leur carrière le succès n'a jamais été vraiment au rendez-vous et ce disque se vendra vraiment mal.



En 1980 le couple se retrouve sans maison de disques, Chrysalis les ayant laissé tombé après deux albums (pour leurs 3 premiers albums ils étaient chez Island). En 1980 ils tournent en première partie de Gerry Rafferty, qui avait participé à leur dernier album. Rafferty leur propose de produite et de financer leur prochain album. Ils se retrouvent tous en studio mais le perfectionnisme de Gerry Rafferty se heurte à l'approche plus spontanée de Richard Thompson. Le courant ne passe plus et malgré le fait que l'album soit terminé, Rafferty n'arrive a convaincre personne de sortir l'album, il perdra plus de 30 000 dollars dans l'opération. Les bandes sont mises au placard et sortiront en bootleg.

Finalement en 1981, Joe Boyd, producteur des meilleurs albums de Fairport Convention, signe le duo sur son petit label, Hannibal Records. Suite à ca, ils vont frapper un grand coup avec la sortie de Shoot Out the Lights. Ca sera malheureusement leur dernier album, leur couple étant en train de se désagréger petit à petit. L'album va être un succès et va relancer leur carrière et va restaurer la réputation de guitariste de Richard Thompson. C'est la qu'il livre probablement ses meilleurs envolées guitaristes comme le solo sur le morceau qui donne son titre à l'album. Le disque est enregistré avec moins de musiciens que les précédents albums, on retrouve sur ce disques ses vieux copains de Fairport Convention : Simon Nicol, Dave Pegg et Dave Mattacks ainsi que Peter Zorn de Steeleye Span.





Le disque marche tellement qu'une tournée américaine est programmée, on retrouve d'ailleurs dans l'edition deluxe de l'album sortie en 2010 un CD qui Live bonus de cette tournée américaine, A cette époque Richard et Linda ne se parlent presque plus bien que Linda soit enceinte de leur fille Kamila qui naîtra en 1983. Ils divorcent en 1982 à la fin de la tournée, mettant fin au duo à la fois personnellement et professionnellement. Un best of sort en 2000, puis un Live de 1975 est édité en 2007. 2020 a vu la sortie d'un coffret qui regroupe les albums du duo, plus des inédits et des Lives.


En 2014, alors que chacun fait carrière solo de son coté et que Richard continue sa carrière de session man en même temps, Teddy Thompson leur fils les réunit sur son album Family, en compagnie de Kamila, leur fille, son mari, un neveu et son demi frère né du deuxième mariage de Richard. Ils s'étaient déjà retrouvé sur l'album de Linda sorti en 2013 ou Richard vient jouer de la guitare.


Totalement ignoré du temps de leur carrière en commun à part au moment de leur séparation et ayant vendu très peu de disques, ils sont aujourd'hui reconnu comme l'un des combo de folk rock les plus importants de l'histoire; Richard est considéré comme le guitariste le plus important du genre. Shout Out the Lights est aujourd'hui reconnu comme un des meilleurs disques de la décennie 80 et I Want to see the Bright Lights Tonight comme l'une des pierre angulaires du folk rock. En 2011 Richard est fait Officier de l'Empire Britannique pour services rendus à la musique et leurs morceaux que ca soit en solo et en duo ont été repris par une multitude d'artistes comme Elvis Costello, David Gilmour Maria McKee







YES : Close to the edge (1972)


1972 : Yes, album après album, arrive enfin à son apogée, atteint sa maturité et livre avec ce cinquième disque son meilleur album, son chef d’œuvre. 

Ce « Close to the edge », est en effet tout simplement un must du rock progressif (selon moi dans le top 5 du genre, sans aucune hésitation), rarement égalé dans un style où les oeuvres de qualité sont pourtant nombreuses.


Je ne suis pas un fan absolu de Yes même dans sa période "progressive" ; si j'adore certains albums, il y en a que j'aime moins voire pas du tout (par exemple j'aime bien « The Yes album », « Fragile » ou « Relayer » mais pas trop « Tales from topographic oceans »).


Disons ouvertement que globalement je préfère Van der Graaf Generator, King Crimson et Genesis mais ces groupes bien que tous soient qualifiés de prog' sont issus d’ “écoles” pas forcément identiques (folk, jazz, classique, pop..) et ont clairement des influences différentes ; par exemple pour Yes la filiation avec la musique classique est évidente. 

Toutefois je ne vais pas parler technique ici, c’est évidemment de haut niveau, chacun en conviendra avec de tels musiciens, mais plus de ressenti et des impressions que m’ont donné les écoutes du disque.


C'est sur cet album qu'on retrouve la formation « classique » de Yes à savoir Anderson, Squire, Bruford, Wakeman et Howe, c’est à dire sans doute la meilleure formation du groupe. 


On remarque tout de suite la voix exceptionnelle de Jon Anderson et l'excellent travail de Rick Wakeman au clavier/synthé (ah l’orgue sur Close to the edge, magistral, grandiose, tout simplement monumental !). 

Si l'on parle souvent, à juste titre, des prouesses d’Anderson ou de Wakeman moi ce qui me marque et ce dont je voudrais parler et mettre en avant c’est avant tout la basse titanesque de Squire, à la fois pesante et virevoltante, pleine de contrastes et qui donne plus que jamais le tempo aux compositions. 


 « Close to the edge “ dure environ 37 minutes, répartis sur trois titres (deux de 10 minutes environ et un qui occupe toute une face), tous trois tout à fait typique du rock progressif du début des années 70.   

Le titre phare est bien sur « Close to the edge » 18 minutes magnifiques, morceau qui alterne les ambiances et où les différentes parties s'enchaînent sans fausse note, où les thèmes musicaux s’articulent à merveille, de façon très cohérente, avec aussi quelque chose de poignant qui se dégage de ce titre, quelque chose de majestueux que seuls la Nature et les Arts peuvent nous léguer...mais les deux autres titres sont loin d'être des faire-valoir soutiennent malgré tout sans problème la comparaison, notamment "And you and I". Le tout avec une certaine diversité rythmique.


Je ne trouve pas les morceaux ennuyeux ni même pompeux (reproche qu'on fait souvent à Yes), en tout cas nettement moins pompeux que « Tales from topographic oceans » un des autres albums importants de Yes ou que certains disques de E.L.P le groupe pompeux par excellence ! Si “Close to the edge” a un côté “pompeux” disons que cela ne me gêne pas alors qu’en général un trop plein de grandiloquence peut vite me sembler pénible et me rebuter mais là quand on évalue le niveau des compositions et la technicité, le résultat final est grandiose car la beauté de l’œuvre se trouve à la fois dans sa globalité mais aussi dans ses prouesses musicales et vocales.


La musique est complexe bien sûr au niveau des compositions mais malgré tout assez épurée (par rapport à Genesis de la même époque par exemple).  Comme tous les grands groupes Yes a un style et un son propres et reconnaissables très rapidement. 
L 'atmosphère du disque a certes un côté “cool” et planant mais c’est surtout somptueux, d'une grande beauté. L’impression parfois de voguer vers des univers et des contrées inexplorées, l'impression de faire un voyage dans un monde de merveilles et de pureté (mot qui caractérise parfaitement l'ambiance du disque je trouve), presque comme dans un rêve. 

Juste dommage que la pochette ne soit pas du même calibre que celles des albums qui vont suivre.


Un album à couper le souffle donc et qui restera l’un des plus beaux disques de "rock", au sens large, jamais enregistrés, un des grands moments de l’âge d’or du prog’, culminant à son apogée, à son zénith, avant son déclin à partir de 1973/74. Osons le dire, quelque part « Close to the edge » représente la quintessence même du rock progressif.

Tangerine Dream : Phaedra


Bonjour messieurs ! Je suis Richard Brandson, et j’aimerais vous signer sur mon label.

Edgard Froese connaissait bien sûr ce nom, tous les journaux en parlaient. Ce blond au sourire carnassier avait commencé sa carrière dans la vente de disques par correspondance. Alors que ses affaires commençaient à bien marcher, la poste anglaise entama une grève qui risquait de mettre fin à sa carrière.c

Brandson a alors ouvert ses magasins Virgin, de véritables temples pour audiophiles curieux. La spécialité de ces boutiques était de brader des disques underground, et le concept a fait un carton. Berlin, fun house, tous ces disques qui passèrent injustement sous tous les radars s’offraient ainsi aux auditeurs les plus téméraires. Fort de son succès, Branson s’est lancé sur un marché du disque en plein âge d’or, en fondant le label virgin record.

Alors inconnu au bataillon , Mike Oldfield n’a que 16 ans quand il devient le premier artiste du label. Le gamin s’enferme alors en studio, et enregistre une composition qu’il a en tête depuis quelques mois. Sûr de lui, il joue de tous les instruments , et parvient à agencer ses parties grâce aux studios modernes. Quand Richard Branson prend contact avec Tangerine Dream , Tubular Bells est dans les bacs depuis quelques mois , et a rapidement atteint le sommet des ventes.

Oldfield devint ainsi le parrain de toute une scène Canterburienne , qui profita de son succès pour s’engouffrer dans la brèche. Plus que de simples businessmen, les responsables de virgin veulent aussi participer à la gigantesque œuvre que bâtit le rock en ce début de seventies. Après que tangerine dream ait signé son contrat, Virgin l’envoie rapidement dans son studio berlinois. Là-bas, le groupe bénéficie de tout l’équipement qu’il souhaite, le label sentant bien que ce trio peut reproduire l’exploit commercial et artistique de son premier protégé.

Edgard Froese reconnaît d’ailleurs que cet équipement dernier cri a largement influencé la musique de Phaedra , mais reste persuadé qu’il aurait pu produire un aussi bon disque sans. Avec Phaedra , la machine reste au service de l’artiste , pas le contraire. D’ailleurs, les sessions d’enregistrements furent un cauchemar, une lutte douloureuse entre l’homme et une technologie encore balbutiante. Le séquenceur ne permettant pas d’enregistrer des sons, les musiciens doivent s’accorder pendant des heures, pour être dans la tonalité d’un sifflement que la machine ne pourra jouer une seconde fois.  En plus de cette préparation interminable, le séquenceur oblige le trio à structurer davantage sa musique, pour poser un cadre capable de donner forme à ses sons hypnotiques.

Ajouter à cela la fragilité de bandes d’enregistrements cassant souvent entre les prises , les fréquences trop basses, qui mettent le séquenceur hors service , et les caprices de mellotrons aux réglages hasardeux , et vous obtenez un cauchemar devant lequel de nombreux explorateurs sonores auraient abdiqué. De ce calvaire naît tout de même la première partie de Phaedra , et Tangerine dream part au manor studio (en Angleterre) pour enregistrer le reste de l’album. Dans la capitale de la pop moderne, Edgard Froese explore les possibilités du mellotron. Désormais salué comme l’instrument sacré du rock progressif, ce clavier lui permet de composer « mysterious semblance of a nightmare » , nuage fascinant qui sera finalement placé en ouverture de l’album.

Pas en reste , Peter Baumann utilise le delay de son synthétiseur pour former le rideau hypnotique qui referme l’album. Phaedra est un fleuve synthétique, un courant méditatif guidé par une syncope fascinante, un swing robotique et vaporeux. Si cette musique est plus structurée, si les battements spatiaux guident les crescendo mystiques de cette symphonie robotique, aucun groupe n’était allé aussi loin dans l’exploration des synthétiseurs modernes.

Entouré par un système de branchements complexe , les musiciens devinrent le cœur mettant en branle un instrument fabuleux, un dieu métallique chantant ses odyssées d’un autre monde. Ce qui était au départ un foisonnement de bruit, un décor qui semblait se constituer grâce à l’aide d’une force inconnue , devient une impressionnante science musicale.  C’est un véritable fleuve synthétique qui coule  entre nos oreilles comblées, un torrent dont les musiciens semblent parfaitement maitriser l’intensité et les ondulations. Les formes évoluent en une succession de sculptures aqueuses, des silhouettes mouvantes ciselées avec précisions par les battements du synthé.

Autour de ses formes, les sifflements des machines font souffler un vent planant, et l’esprit n’a plus qu’à se laisser emporter par ce mistral bienfaisant. Lors de la sortie de ce disque, beaucoup parleront de la naissance d’une école de Berlin. Cette nouvelle étiquette fut surtout pratique pour regrouper Neu ! Can , Tangerine Dream , Kraftwerk et autres musiciens teutons. Elle permet aussi à toute une critique, qui n’a jamais beaucoup aimé cette avant-garde allemande , de retourner sa veste sans trop montrer qu’elle n’y comprenait rien.  

Le succès de Phaedra arrivait bien en même temps que des classiques tels que autobahn , ou soon over babaluma , mais il y avait un monde entre chacune de ces œuvres. A la réecoute de chacun d’eux, on ne peut que constater que phaedra reste le plus futuriste. Ecouter cet album , avec nos oreilles modernes , c’est ressentir le même émerveillement que ceux qui le découvrirent en 1974. Plus qu’un épisode de l’irrésistible ascension de l’avant-garde allemande, Phaedra est un véritable ticket vers le cosmos dont on ne pourra jamais se lasser.           

mardi 22 décembre 2020

Tin Machine : La période oubliée de David Bowie


Nous sommes en 1984 , et le rock vit les heures les plus sombres de son histoire. Dans les bacs , Let’s dance , le dernier album de David Bowie fait une entrée fracassante. On le reconnait à peine, planté dans une position de boxeur en plein combat, sur un fond verdâtre. Avec ses cheveux blonds , sa musculature de Rocky anglais , et son bronzage orangé , l’ex provocateur androgyne devenait un sex-symbol prêt à assommer la concurrence. Sauf que celle-ci ne s’appelait plus les Stones, les Who où les Kinks , mais Mickael Jackson , Madonna et Prince.

Dans ces conditions , l’enjeu n’était plus de faire découvrir au public de nouveaux univers , mais de se rapprocher le plus possible de ce qu’il pourrait aimer. Alors Bowie a accepté ces règles , comptant sur Nile Rodgers pour lui concocter la production la plus tapageuse possible. Il touche ainsi la timbale en réadaptant le crescendo de twist and shout , sur un let’s dance qui fera bientôt le tour des radios et des fêtes foraines.

Pour comprendre ce revirement, il faut rappeler que Bowie a souvent vécu son époque plus intensément que ses contemporains. Lorsque ses tubes soul conquirent l’Amérique, il devint un dandy junkie capable de faire passer les plus grands rockers pour des fils de bonne famille. Squelettique et blafard, Bowie a bien failli ne pas survivre à la folie créative des seventies.

De ses tourments naquirent les chefs-d’œuvre froid d’une trilogie dite berlinoise , qui faisait elle-même suite à une période groovy brillante. Et puis notre caméléon a survécu à ses tourments, a nettoyé son corps des poisons toxiques qu’il consommait en quantité astronomique , et est venu réclamer les fruits de son glorieux parcours. Let’s dance n’était rien d’autre que la superproduction sensée le faire entrer dans le rang des superstars les plus rentables.

Album raté artistiquement, let’s dance fut assez maquillé pour séduire les foules. Le succès commercial fut tel, que Bowie entra dans un cercle infernal, où les compromis commerciaux vidaient sont art de sa substance. Tonight ne le perturba pourtant pas plus que ça. Il le considérait comme une simple erreur de parcours, un disque complétement raté que le temps fera oublier. Sauf que l’album suivant, never let me down, s’était enfoncé dans le même marasme. 

Cette fois , Bowie ne supporte plus le piège dans lequel il s’est fourré , ne veut plus faire des compromis qui étouffe sa musique. Il en est convaincu, never let me down contenait de bonnes chansons , mais la production a massacré ses quelques perles. La tournée qui a suivi la sortie de l’album ne fut pas plus rassurante, le glass spider tour s’imposant vite comme la tournée la plus ridiculement grandiloquente de sa carrière.

Tiré vers le bas par une fanfare sans tête, Bowie réussit même à massacrer ses classiques, et ce ne sont pas ses effets spéciaux tapageurs qui le sauveront du désastre. Alors son public se met à se réfugier dans sa nostalgie, et on lui propose vite de réciter ses classiques lors d’une tournée exceptionnelle. Celle-ci aura bien lieu, sous le nom de sound+vision tour , mais Bowie jurera qu’il chante ses vieilleries pour la dernière fois.

Comment faire oublier ses dernières erreurs sans sombrer dans le passéisme ? Voilà la question qui taraude notre caméléon pop en cette fin d’eighties. La réponse se présente à lui sous la forme d’une cassette, que sa secrétaire lui transmet à la fin du glass spider tour. Il s’agit du premier enregistrement d’un trio inconnu au bataillon, et dans lequel Bowie entrevoit une possibilité de sortir de son impasse.

Il appelle donc ces jeunes musiciens, et demande humblement si il peut devenir le chanteur de leur groupe. N’en croyant pas leurs oreilles, les chanceux acceptent rapidement. Surtout quand leur interlocuteur leur annonce qu’il ne veut pas les traiter comme une bande de fonctionnaires à ses ordres, mais bien comme le groupe dont il fait partie.

Refusant de retourner dans les grands stades où il étouffe, Bowie nomme son groupe Tin machine, et fait la tournée des petites salles. Les nouvelles allant vite, les pauvres enceintes accueillant la prestation de ce groupe pas si inconnu sont vite assiégées par une horde de Bowiemaniacs. Seule une petite partie d’entres eux aura l’honneur d’assister à ses concerts intimistes, où leur idole change une nouvelle fois de visage.

En privé, Bowie a plusieurs fois affirmé qu’il prenait un plaisir immense lorsqu’il jouait avec les spiders from mars, et il semble retrouver ce plaisir avec tin machine. Comme pour symboliser cette joie retrouvée, Bowie apparaît parfois avec les plates-formes boots de Ziggy Stardust.

Sorti en 1988, le premier album de tin machine lui permet de tuer ses piteuses eighties. Sur les passages les plus heavy , Reeve Gabriel salue la violence théâtrale dont Mick Ronson fit preuve sur le trop sous-estimé the man who sold the word. Nourri par cette violence, Tin Machine en profite pour saluer une autre figure incontournable de la mythologie Bowienne. Tendu comme une jam proto punk , Tin Machine ( le morceau titre)  rappelle les exploits d’un Iggy Pop dirigeant les coups de sang destroy des Stooges.

Caché derrière ce chaos électrique , Bowie se régénère au milieu de cette centrale tonitruante. Le sex-symbol insipide qu’il fut encore quelques mois plus tôt est déjà mort, et pour une fois personne ne regrettera la disparition ce calamiteux personnage. 

Quelques semaines après la sortie du disque, une armée de garage rockers et de brutes grunge viennent achever le spectre écœurant des eighties. D’une certaine manière, Bowie avait encore pressenti les changements à venir, mais il ne les a pas influencés. Plombé par sa volonté de ne jouer que dans de petites salles, Tin machine ne trouve pas son public , et doit se séparer après un second disque aussi impopulaire que le premier.

Aujourd’hui, les deux disques de ce groupe éphémère sont devenus des albums cultes. Si ils ne sont pas des chefs-d'œuvre, tin machine et tin machine II sont des maillons essentiels de l’œuvre de Bowie.