Rubriques

mercredi 20 novembre 2019

SCORPIONS : In Trance (1975)

Formation

Klaus Meine : chant
Rudolf Schenker : guitare
Uli Roth : guitare, chant
Francis Bucholtz : basse
Rudy Lenners : batterie




On peut dire que Scorpions revient de loin ; après l'échec de leur premier album « Lonesome crow » (plutôt dans un genre rock psychédélique mais loin d'être une réussite, un album atypique dans la carrière du groupe) Scorpions explose et seuls restent Klaus Meine et Rudolf Schenker ; coup de chance ils proposent à Uli Roth(grand fan de Hendrix devant l'éternel) et d'autres musiciens d'un autre obscur groupe allemand Down Road de se joindre à eux et c'est reparti...pour la carrière qu'on connait.

Avec sa nouvelle formation Scorpions amorce sa métamporphose d'un rock planant/psychédélique vers un rock hendrixien mélé de ballades et de hard rock 70's.
Et en effet après des années de galère la formation peut enfin se stabiliser : le brillant Michael Schenker est parti chez UFO mais il a été remplacé par un autre brillant guitariste (dans un style différent) Uli Roth et Scorpions peut dès lors vraiment dès lors prendre son envol définitif. D'ailleurs dans les années 70 le parallèle qu'on peut faire entre les carrières de Scorpions et de UFO est assez étonnant.
« In trance » est le troisième album de Scorpions (et premier produit par Dieter Dierks leur producteur fétiche) qui augmente le niveau disque après disque, et là on gravit encore une grande marche par rapport à « Fly to the rainbow » déjà plein de promesses mais avec encore pas mal de défauts.
Pour moi avec « In Trance » c'est le début de la grande époque de Scorpions, l'âge d'or créatif du groupe (1975-1980).


Je le place dans le top 4 du groupe avec « Virgin Killer », « Blackout » et « Lovedrive «  même s'il est avant tout un disque de transition entre le début planant et psychédélique de Scorpions (hendrixien) et les albums plus hard à venir (« Virgin killer » et « Taken by force »).
« In trance » est très diversifié, avec de très bons morceaux, quelques classiques du Scorpions 70's « Dark lady », « In trance », « Robot man ». Le duo R.Schenker / U.Roth fonctionne bien.
Ce dernier montre qu'il est un grand guitariste (mais un piètre chanteur, heureusement il ne chante que sur deux titres ; sur « Dark Lady » passe encore mais sur « Sun in my hand » c'est horrible).


On trouve déjà des balades de qualité « Life's like a river » (magnifique) , « Living and dying » (sublime) et « Evening wind ». Oubliez les slows sirupeux des années 80 et écouter les ballades de « In Trance » largement supérieures.
Trois perles auxquelles on peut rajouter « In trance » (le morceau), quatrième titre cool, mi ballade mi morceau hard.
« Top of the bill » me plaît moins avec une guitare qui vous électrifie mais où malheureusement Meine force trop sa voix.
Pour le reste il montre qu'il est l'un des plus grands chanteurs du hard toute période confondue.


Sur cet album le groupe digère relativement bien ses sources d'inspiration : hard rock classique, rock planant et influences hendrixiennes, sans oublier évidemment les ballades . Une alchimie déjà bien en place.
Hormis « Robot man » on constate que c'est sur les titres cool que le groupe est le plus à l'aise même si « Dark lady » qui ouvre l'album est plutôt intéressant.
On finit par un instrumental correct sans plus « Nights lights »
Du très bon mais aussi un peu moins bon, un album plein de qualités mais un peu trop inégal. Dommage mais la balance est néanmoins largement positive.


dimanche 17 novembre 2019

The Ramones : Gabba Gabba Hey : épisode 1


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Attention, cet article est un plaidoyer à la gloire de la simplicité, une tomate envoyée à la figure de ceux qui oublièrent que le rock est avant tout un cri primaire. En un mot comme en mille, c’est un manifeste pour réhabiliter la foisonnante discographie d’un groupe qui fit tant, avec seulement 3 accords. Sur ce, lançons notre cri de guerre et entrons dans la légende : Gabba Gabba Hey !

La jeunesse des ramones semble tirée d’une chanson de Lou Reed , avec ses dealers attendant leurs dûs aux coins des rues , et ses couples dysfonctionnels créant leurs propres purgatoires. Johnny et Dee Dee venaient de ses bas-fonds new yorkais , et Dee Dee a connu la « fièvre blanche » dès ses quinze ans , afin d’oublier les délires d’une mère déséquilibrée et d’un père alcoolique.  Johnny n’est pas issu d’un milieu plus reluisant, et copiera vite le tempérament autoritaire d’un père qui n’hésite pas lui demandé « alors j’ai élevé une fiotte ? » à la moindre de ses défaillances.

Cet environnement particulièrement dur va forger le caractère agressif de Johnny, qui trouve vite en Dee Dee un compagnon de misère. Avec sa coupe au bol et son air paumé, Dee Dee ressemble à un fan des beatles perdu dans un roman de Burrough , alors que Johnny développe une rage qui force naturellement le respect.

Ce parcours erratique, les amènes à croiser la route de Tommy et Joey, comme si leur air paumé les avaient prédestiné à créer un groupe. Fondateur du gang , Tommy dira lui-même que personne n’aurait parié un kopec sur cette bande de marginaux , qui joue en public avant même de maitriser leur instrument.

Après plusieurs tâtonnements, les rôles se définissent, Dee Dee découvre « qu’il y’a un do sur cette putain de basse » , et Joey s’affirme comme le digne frontman de ce gang de marginaux. Ayant frôlé l’hôpital psychiatrique, après qu’on lui eut diagnostiqué une « schizophrénie paranoïaque, il se nourrira de cette expérience pour chanter les classiques délirants qui jalonneront l’histoire du groupe.

Le rock est la seule bouée de sauvetage des Ramones , le seul milieu susceptible de leur donner une place, et ils s’y jettent comme si leur vie en dépendaient . D’abord tiraillé entre un chanteur et un bassiste obnubilés par les beatles , et un guitariste vénérant la violence led zepplinienne , tout ce petit monde se met d’accord en découvrant le premier album des New York Dolls.

Véritable chainon manquant entre la simplicité des premiers beatles et la violence crue de led zepp, le groupe de Johnny Thunder montre la voie d’une agressivité sonore libérée de toutes préoccupations musicales.   
                                                                                                                               
Tout le monde peut le faire ! Voilà le message des Dolls , message que les ramones vont propager à un rythme infernal. D’abord catastrophique, leurs concerts prennent progressivement la forme de bombardements libérateurs , où les faux frères New Yorkais prennent à peine le temps de s’arrêter entre les titres.
                                      
Johnny résumera cette philosophie de manière un peu pompeuse en affirmant «  le rock se mourrait et nous voulions le sauver ». C’est que le rock commençait à sérieusement se regarder le nombril, se prenant lamentablement au sérieux à travers ses instrumentaux interminables , ses solos vertigineux , et ses concepts élitistes. Quand Dee Dee hurle « one , two, tree, four » , c’est plus pour annoncer une nouvelle salve contre cet académisme d’opérette, que pour fixer la mesure de titres souvent calqués sur la même cadence.   

Le groupe devient rapidement la coqueluche du CBGB ,un  club bluegrass sur le déclin, qui se refait une santé en devenant le haut lieu de l’underground Américain. Entre ses murs , les Iggy Pop , blondie , Patti Smith et la crème du nihilisme rock écrit les premières pages de sa légende. C’est aussi là que, subjugué par l’énergie des faux frères ramonseques , Mclaren trouve le dernier élément de son plan de conquête des charts : il se nommera sex pistols.

On retiendra aussi cette phrase lancée par Joey à Joe Strummer « Nous sommes nuls. Si tu attends d’être bon pour former un groupe, tu seras trop vieux quand ça arrivera ». En 1976, Danny Fields, l’homme qui découvrit le MC5 et les stooges , invite ces « nuls » à enregistrer leur premier album.
La cartoo… Euh la légende peut commencer.

Ramones

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Premier journaliste français ayant chroniqué ce disque , Philippe Manœuvre réussit au moins à résumer l’incompréhension , voire le mépris , dont le groupe sera victime tout au long de sa carrière .
« On avait besoin de nouveaux stooges , pas de mecs avec des T shirts mickeys » déclare t’il quelques années plus tard.

Les ramones ne faisaient pourtant que perpétuer le message du groupe d’Iggy Pop , en le radicalisant. « search and destroy » et « blitzkrieg bop » sont fait du même bois , ils rendent aux gamins une musique confisquée par les expérimentations prétentieuses des dinosaures de stades.

Fini les solos à rallonge , les instrumentaux se perdant dans des délires alambiqués , ce premier album se résume à quinze parpaings pop ne dépassant jamais les 3 minutes. Trois accords , trois phrases , trois minutes , voilà la sainte trinité promue par les ramones , et servit par une production ultra minimaliste.

« Now I wanna sniff some glue » donnera son nom au magazine emblématique de la scène punk , qui passera une bonne partie de son existence à défendre vaillamment la verve ramonesque. Récités comme des mantras , les refrains entétants de « 53 rd » , « blitzkrieg bop » , et autres « sheena is a punk » viennent nettoyer le rock de la boue complaisante dans laquelle il s’était englué.

Mal vendu , descendu par la critique , « ramones » deviendra tout de même le disque underground le plus influent depuis le premier velvet.


Leave Home

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« Résumons nous : Les ramones représentent une partie infime de cette énergie que les stooges ont canalisé au péril de leurs vies, avec une maestra bien connue. »
Non , Monsieur Manœuvre , les ramones n’étaient pas un simple coup tenté par un manager aux dents longues.

Leur nihilisme,  les ramones le font survivre grâce au rythme infernal de leurs tournées comme les stooges avant eux. Là , leurs riffs deviennent moins mécaniques , les mélodies plus fluides, mais la simplicité reste. Le message est le même , « carbonna not glue » s’incrivant dans le même sillon décadent que sniff some glue, dans une série qui ressemble à une version minimaliste d’heroin.

La seule différence majeure entre ce disque et le précèdent, c’est que Johnny Ramones n’a plus l’air de tenir une guitare pour la première fois de sa vie. Plus carré , les refrain s’imposent comme une version sous speed de la pop sixties, « now i wanna be a god boy » bénéficiant d’un refrain taillé pour devenir aussi culte que « all you need is love », avant que les chœurs ne fassent leurs  apparitions sur swallow my pride. Avec les bruitages pop de beach boys de cartoon , ils montrent le besoin de reconnaissance d’un groupe qui commence à draguer le grand public.    


vendredi 15 novembre 2019

Mott The Hoople : Wildlife


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Depuis 1969 , et alors que mott the hoople ne parvient toujours pas à obtenir un large succès , la country est devenue la nouvelle grande préoccupation de l’époque. S’il est admis que le chaos d’Altamont signa la fin du rêve hippie, cette mort est actée musicalement par ce changement pour le moins radical.

Le psychédelisme était une musique révolutionnaire, aventureuse , et ayant pour ambition d’exprimer ce désir de liberté , et de changement, qu’illustrait brillamment Kerouac dans les pages de « sur la route ». La country, elle, était une musique traditionnelle, une musique de pionnier. Pendant des années, les deux cultures étaient bien séparées, les disquaires marquant les disques de Muddy Water et John Lee Hoocker du sceau de « race record ».

Si le rock est devenu si important, c’est avant tout parce qu’il a su marier deux influences qui exprimaient les mêmes idéaux. La country, comme le folk n’étaient rien d’autre qu’un « blues de blanc », et ce n’est pas pour rien que la voix rocailleuse de Cash semblait parfois proche des grands bluesmens (écoutez sa version de rusty cage et le live à San Quentin si vous en doutez).

En somme, après des années passés à planer sous l’effet du LSD , les groupes de San Francisco atterrissaient et redécouvraient le charme des mélodies rustiques. Berceau du mouvement psyché, la ville devenait désormais le centre de ce retour à la terre.

A l’origine de ce changement, il y’a celui qui fut toujours le guide de ces jeunes freaks, Bob Dylan. Démarré dès 1967, son virage country a d’abord dégouté le public hippie, qui réévaluera l’album « John Whesley Hardin » après que ses héros creusent le même sillon.  

Parmi les chefs d’œuvres ayant converti ces hippies , on trouve le premier album que d’ex airplane produisirent sous le nom de hot tuna , workinman’s dead , sweartheart of the rodeo , et wildlife… Enfin non, pour wildlife ce fut plus compliqué.

Le premier défaut de mott sera d’abord d’être anglais , à une époque où l’angleterre est bien loin des mélodies campagnardes de l’Amérique. L’Angleterre, c’est encore le hard rock, et les excès progressifs de groupes qui continuent de répondre à un géant psychédélique enterré. In the court of the crimson king et led zepp I , voilà encore les disques qui définissent la culture musicale anglaise lorsque wildlife sort , en 1970.

Dylanien à une époque ou Dylan perdait déjà progressivement son influence, et privé du soutien d’une scène qui s’épanouissait à plusieurs kilomètres , wildlife ne pouvait que confirmer la réputation de groupe maudit que le mott commence à se trainer.

Sur plusieurs mélodies, le groupe sonne presque comme le band, qui vient de sortir music from the big pink un peu plus d’un an auparavant. « wrong side of the river » est d’ailleurs doté d’une mélodie nostalgique que n’aurait pas renié le groupe de Robbie Robertson. Et je ne parle même pas de ses bluettes, où le clavier se fait plus solennel, soutenant des chœurs qui semblent parfois fouler les terrains balisés par Crosby Still et Nash.

Pour faire bonne mesure, le groupe ouvre l’album par le boogie « whiskey women » , avant de botter le cul d’Eddie Cochran sur un final redéfinissant le rock des pionniers. Comme je l’ai dit précédemment, le blues et la country ne sont que les deux faces d’une même pièce, et cette pièce se nomme rock n roll.     

        

lundi 11 novembre 2019

CRASS : Penis Envy (1981)


Formation :
Eve Libertine - chant
Joy De Vivre - chant sur "Health Surface", choeurs
Phil Free - guitare
B.A.Nana (N.A.Palmer) - guitare
Pete Wright - basse
Penny Rimbaud - batterie


« Penis Envy » est le troisième album de CRASS, le groupe fondateur de l'anarcho-punk, le groupe qui fonctionne comme un collectif. Pour commencer il faut bien avoir toujours en tête que dans ce courant musical la pochette et l’esthétisme en général (look, logo) et les textes (surtout les textes, qui ici sont engagés et intéressants) sont aussi importants voire plus que la musique. Le but étant ouvertement de faire passer un message politique, anarchiste et/ou pacifiste, de politiser les punks (en opposition par rapport aux punks uniquement dans un trip « destroy », « provocateurs » ou nihiliste et n’ayant aucune vision politique hormis de se revendiquer « anti-système »). De faire réfléchir. Le groupe s’en prend dès le départ à Clash, politisé certes, mais qui a signé chez le gros label CBS et les accuse de critiquer le capitalisme tout en signant sur une multinationale (cf morceau « Punk is dead » sur le premier LP), ce à quoi Clash rétorquera que cela permet d’avoir une audience et une portée beaucoup plus grandes, une meilleure visibilité (et de fait le London calling de Clash aura une audience plus importante que n’importe quel album de CRASS). Le débat n’est toujours pas résolu et reste ouvert (deux conceptions différentes de l’attitude à avoir face aux majors), malgré tout les faits montrent qu’au final c’est toujours la multinationale qui a le dernier mot (et très rares sont les groupes qui ont assez de poids pour ne pas faire de compromis). Toujours est-il que CRASS fidèle à ses idées créée son propre label, et le mouvement aura ses propres réseaux de distributions, ses propres réseaux de concerts (squats, centres autogérés) ses propres fanzines, les bases du DIY (do it yourself = le faire par soi-même) sont posées. CRASS dès ses débuts joue une musique basique, ultra primaire (notamment sur les deux premiers albums).

De prime abord, à la première écoute, c'est vrai que cela peut sembler très basique et primaire mais en écoutant plus attentivement on se rend compte qu'au delà de l'aspect minimaliste évident les compositions sont plus travaillées et mélodiques qu'elles n'y paraissent notamment sur « Where is Colombus ? » voire « Systematic death ».
Car musicalement parlant « Penis Envy » est le meilleur album du groupe », plus abouti que les deux précédents, le plus accessible aussi, avec les deux chanteuses au micro, Eve Libertine (la chanteuse principale), secondée de Joy de vivre (l’habituel chanteur de CRASS Steve Ignorant n’est donc pas présent sur cet album). J’ai d’ailleurs toujours trouvé que les voix féminines pouvaient amener des ambiances différentes au punk rock, quelque chose de plus, d’intéressant et là c’est clairement le cas avec un timbre de voix assez inhabituel pour l’époque (cf titre « Poison is a pretty pill »). On a beaucoup reproché à CRASS sa pauvreté musicale mais là le groupe s’est surpassé, c’est toujours minimaliste (mais ce punk minimaliste c'est aussi la marque de fabrique du collectif) mais ça tient parfaitement la route à tout point de vue. Oui CRASS sait jouer ! 

Le son, notamment des guitares, est assez typique des premiers groupes anarcho-punk anglais. Mais la voix atténue un peu le côté austère de l’ambiance générale. Sur cet album les textes, habituellement axés sur un pacifisme intransigeant et sur l’anarchisme, prennent ici une thématique plus féministe. Musicalement il y a vraiment de bonnes chansons, ma préférée étant « Where next Colombus ? » avec un refrain qui ne vous lâchera plus. Un très grand titre. Mais aussi « Bata motel », « Systematic death », « Poison is pretty pill » et “Berkertex bribe”. Et je ne vois que deux titres un peu faibles « What the fuck ? » (avec son texte récité) et « Our weeding ». En tout cas ce Penis Envy me réconcilie avec CRASS car j’avoue que musicalement parlant je ne suis pas trop fan du premier LP « The feeding of the 5000 » même s’il contient la plupart des standards du groupe.

Après la dissolution du groupe fondateur l’anarcho-punk verra quelques divergences apparaître entre ceux qui veulent rester sur la ligne anarcho-pacifiste de CRASS et d’autres qui auront une vision et une stratégie un peu différente (Conflict…), avec malgré tout une base et un cadre communs : le DIY… mais cela est une autre histoire et pour le moment ne boudons pas le plaisir d’écouter ce « Penis Envy » un classique de ce courant, plus important qu’il n’y paraît, mais souvent méconnu dans la mesure où l’intransigeance des groupes les confinait dans un (relatif) anonymat, alors que certains avaient un indéniable talent (Subhumans, Citizen Fish, Inner Terrestrials ou Oï Polloï…pour rester en Grande Bretagne).

Et puis si d'un point de vue strictement musical Clash est sans doute supérieur à CRASS ces derniers représentent l'autre facette, l'autre Histoire du mouvement punk, celle du Do it Yourself et celle de certains principes de fonctionnement non négociables.

Mott the hoople : Mad Shadow


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La plupart des groupes ne sont jamais aussi bons qu’à leur début, quand leurs riffs nourrissent le puissant brasier de leurs ambitions juvéniles. Mocky disait que, pour réussir, un artiste doit avoir faim, son art n’étant ainsi que l’expression de son désir de réussir. Cette vision peut paraitre un peu galvaudée, mais elle a guidé les plus belles années du rock.

Des groupes comme led zepp , les blue oyster cult, ou black sabbath étaient en mission pour imposer leurs visions, et passer devant la concurrence. Puis le commerce reprend ses droit, imposant une vision plus standardisée de ces groupes , ou les dirigeant vers des voies plus populaires.

Si ce n’est pas forcément le cas pour les groupes précédemment cités , cela explique qu’ACDC n’a jamais dépassé la puissance spontanée des albums produits par vanda et young, et je ne parle même pas des deux premiers aerosmith, qui valent bien la virtuosité sacralisée de « rock ».
                           
Pour mott the hoople , le constat est encore plus cruel. Ecouter les premiers disques du groupe, c’est se rendre compte que Bowie a sacrifié l’essence de leur charisme pour les livrer aux hordes de disciples de ziggy stardust. « all the young dude » est tout de même un très bon disque, mais il ne représentait plus la puissance de ce qui fut surtout une furieuse bande de rockers crasseux. Malheureusement, le public est lui-même buté, et ne donne du succès à un disque que si il s’insère dans la vague dominante.

 Le premier album de Mott ne devait son succès qu’au hard rock naissant, dans lequel ses riffs tonitruants semblaient s’insérer. L’album était brillant , mais le soufflet est vite retombé , laissant « mad shadows » sortir dans une indifférence unanime. Il faut dire que le disque n’a rien fait pour creuser le même sillon prometteur, le groupe ayant décidé d’affuter son feeling stonien.

En ce sens , « mad shadows » est une grandiose déclaration d’intention , un brasier rythm n blues au milieu duquel le groupe dynamite jumping jack flash des stones. Et puis il y’a les ballades comme « I can feel », où brille la voix inimitable de Ian Hunter. Là encore, ces ballades sont bien loins des douceurs pop de « all the young dude », la guitare sortant rapidement de son silence pour imposer un solo tout en puissance contenue.

Mott the hooples garde sa force, mais celle-ci est désormais plus maitrisée, comme si le grand bazar du premier album était mêlé au blues fascinant de beggar banquet, le disque que les stones ont sorti quelques mois auparavant.

Commercialement , ce virage va s’avérer désastreux , le rythm n blues de mad shadows paraissant bien poli à côté des grandes déflagrations que sont les premiers albums de black sabbath et led zeppelin.

Et ce n’est pas le final cataclysmique de thread of iron qui allait berner les disciples de la nouvelle religion heavy, qui avaient bien compris que ce disque était un nouveau brulot rythm n blues. Et c’est justement sa force , « mad shadows » affirme une nouvelle facette de la personnalité musicale de mott the hoople, en délivrant une énergie d’une nouvelle nature, incomprise de tous.

Y gouter c’est découvrir que, contrairement à ce qui est aujourd’hui admis, mott the hoople était bien meilleur sans Bowie.    
                                                                         

samedi 9 novembre 2019

Mott the hoople : mott the hoople


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On reproche toujours à la critique d’être cartésienne, de prétendre séparer le bon grain de l’ivraie, d’écrire un évangile rock qui, dans son appellation même,  est une aberration. La critique, au contraire, est saine parce qu’elle incite à la réflexion et au doute, qui resteront toujours de puissants remèdes contre le fanatisme.

Plus que croire, les fanatiques exigent que nous ne doutions pas, que nous prenions leurs opinions brutes et complètes. Le critique, lui, ne peut que douter, chaque disque lui ouvrant les portes d’une nouvelle vision de sa musique.
                                                                          
Quand le coffret mental train est sorti*, il n’a pas du s’en vendre beaucoup. Ceux qui achetaient encore des disques suivaient le plus souvent les conseils avisés des magazines, et des « discothèques rocks idéales » qui se multiplient sur les étals des libraires. Or, mott the hoople n’a jamais était la tasse de thé de la critique rock, qui fut juste forcée de reconnaitre son talent lorsque Bowie les aida à accoucher du superbe « all the young dude ».

Les plus aventureux y ajoutaient les plus rugueux « mott » , « the hoople », et le sulfureux live. La messe était ainsi dite, et on oubliait tous les passionnants tâtonnements qui précédèrent la sortie de ces albums. Car, avant que Bowie ne les convertisse à l’esthétique glam, Mott était un gang de sauvages maudits.

A ses débuts, le groupe trouve une rampe de lancement en Italie , où il déploie un rythm n blues d’une puissance à faire rougir les compagnons de Pete Townshend.  Une petite maison de disque s’intéresse rapidement au groupe, mais , si elle lui permet d’enregistrer ses premiers titres, elle ne parvient pas susciter l’intérêt des gros distributeurs que sont EMI et polydor.

Le groupe rentre donc à Londres , qu’il fait swinguer plusieurs années après le passage des who , stones et autres kinks.Là-bas , ceux qui se nommaient the shakedown sound sont renommés mott the hoople par leurs manager , et island record décide de sortir les albums de ce qui est alors un groupe prometteur.

Parait ensuite un disque qui est à mott the hoople ce que « john mayall and the bluesbreaker » fut pour Clapton , l’expression la plus pure de ce que les musiciens souhaitaient offrir. L’ouverture cueille le rock à froid, en faisant de « you really got me » un magma sonore, d’une puissance que même Van Halen ne parviendra à égaler quelques années plus tard.

Si il existe une version définitive du brulot des kinks , elle se trouve bien dans ce raffut instrumental , où les riffs fulgurants viennent gifler la concurrence proto hard rock. La plupart des critiques de l’époque prirent d’ailleurs ce disque pour une autre réponse aux riffs stridents des yardbirds , le condamnant ainsi à un succès éphémère.

D’autres, plus fins, lui reprochent cette hésitation entre mélodie Dylanesque et rugissement de rocker crasseux. Cette hésitation entre classe et spontanéité qui tiraillera le groupe tout au long de sa carrière , et qui s’exprime ici dans son plus simple appareil a même trouvé une étiquette pour la qualifier : garage rock.

Mais c’est vite oublier le travail du producteur Guy Stevens qui , tout juste sorti de la production du premier free, décide de mettre un peu d’ordre dans le grand foutoir produit par le groupe. Et, contrairement à Bowie, il ne fera rien d’autre, et se contentera de donner un feeling presque stonien à ces envolées juvéniles.

Comment résumer ce disque ? C’est les stones singeant les who , c’est Dylan déversant ses mélodies devant le clavier de Keith Emerson , c’est ce que le rock a de plus puissant tout en prenant le temps de soigner sa grâce pop.

« Wrath and roll » et « rock n roll queen » sont des riffs irrésistibles, dont le minimalisme est un véritable « fuck ! » envoyé aux enfants d’Hendrix, un rock carré et efficace que seul Keith Richard semblait encore capable de produire.

Juste avant , Ian Hunter s’était pris pour Dylan, annonçant les mélodies campagnardes de wildlife sur  « Laugh At Me » et « Backsliding Fearlessly » . Et puis le groupe a tout foutu en l’air , clôturant la mélodie grandiloquente de « laugh at me » dans un monumental chaos sonore, sans doute un des moments les plus rock capturé sur disque.

Ici , mott the hoople n’est pas seulement une formation tiraillée entre ses influences , c’est un réceptacle ardent, qui s’est imprégné de ce que le rock a produit de meilleur, et qui décide de le dégommer violement. Ian Hunter disait que Bowie voyait le groupe comme «  un gang de bikers maudit ». La malédiction réside surtout dans le fait que ce premier disque soit tombé dans l’oubli. 

*Coffret regroupant la période island de Mott , soit les quatre premiers disques, un live , et une compil de singles.          

jeudi 7 novembre 2019

THEATRE OF TRAGEDY : Velvet darkness they fear (1996)

Formation :

Raymond Rohonyi - Chant masculin
Liv Kristine - chant féminin
Geir Flikkeil - guitares
Tommy Lindal - guitares
Eirik T. Saltrø - basse
Hein Frode Hansen - Batterie
Lorentz Aspen – claviers, piano






Années 90 : une nouvelle vague de métal gothique apparaît emmenée le plus souvent par des chanteuses. Ainsi beaucoup de groupes de ce genre à voix féminines/masculines surfent sur la vague nouvelle, celle-ci apportant alors indéniablement quelque chose de neuf au métal ; dans le lot on eut droit à plusieurs bons albums, mais au final deux groupes ont surnagé : The Gathering (un peu différent musicalement parlant, plus atmosphérique, planant et avec juste une chanteuse) et Theatre of Tragedy le groupe qui a popularisé le style qui verra apparaître Tristania, After Forever, The Sins of thy beloved, Within Temptation, Darkwell, On Thorns I Lay, Lacuna Coil...(TOT peut être considéré comme le pionnier du métal à chant alterné et/ou superposé mixte).
« Velvet darkness they fear » sorti en 1996 est le second et meilleur album de Theatre of Tragedy (après le premier album éponyme et déjà prometteur), l'album de la consécration pour les norvégiens.
L'alchimie entre les voix est ici parfaite pour l'un des meilleurs albums de métal gothique : les voix sont sublimes (féminine éthérée et masculine gutturale), les compositions entre gothique et doom/death.
Avec un côté lyrique très présent dans les compos ce qui en fait sans doute l’album le plus abouti du genre.
Le violon les synthés et surtout le piano sont très bien utilisés, le piano dont chaque note tombe comme des gouttelettes de pluie.
Car ici tout est magnifiquement composé et orchestré (le groupe entier est crédité mais c'est le pianiste / claviériste Lorentz Aspen qui est le compositeur principal).
Beaucoup de groupes, autant métal que new-wave, refusent l'étiquette de gothique mais là le terme colle vraiment à la musique : du vrai métal gothique (mélangé certes à des influences plus doom/death) mais celui est bien présent (également dans les textes et les thèmes des morceaux, le look, la pochette…).
Dès les premières notes de « Fair and guiling copesmate death » on rentre dans le vif du sujet : piano, voix féminine éthérée de Liv Kristine, violon, gros riffs de guitare (même si les guitares restent en retrait, ici pas de démonstration technique ou de solos), voix masculine grave ou gutturale de Raymond J Rohonyi : « la belle et la bête », « la glace et le feu » on a tout dit et écrit sur ce duo de vocalistes qui a influencé tant de groupes.
Liv Kristine est de tout façon l'une des trois meilleures chanteuses de métal il n'y a même pas débat à avoir car sa voix a des intonations tellement sublimes et féérique qu’elle n’a pas besoin de s’étaler sur plusieurs octaves.
Les voix se succèdent, se superposent ou se répondent mais Theatre of Tragedy est à mon avis le groupe qui maîtrise le mieux le sujet.
Les ambiances sont alternées à merveille entre la facette death et celle plus atmosphérique.
C’est grandiose, magistral, beaucoup de nostalgie, de tristesse ; c’est d'une grande beauté, d’une beauté à couper le souffle, plus mélancolique que véritablement sombre d’ailleurs. Une musique et des voix habitées par une passion qui donne le frisson.
Le rythme est lent mais sans être lourd, les morceaux durent entre 5 et 8 minutes.
Les meilleurs titres hormis, « Fair and guiling copesmate death », sont « Der Tanz der Schatten (avec un chant en allemand où l'influence de l'opéra germanique et notamment wagnérien est évidente, un chant époustouflant où on atteint le sublime, la grande pièce du disque), là où les voix font merveille puis « Seraphic Deviltry », « And when he falleth », « Black as the devil painteth » et « The Masquarade and Phoenix » pour son final.
Des morceaux qui vous emportent très loin vers des horizons inconnus et magiques, envoûtants.
Ensuite le groupe évoluera vers un autre style plus électronique (avec le néanmoins très bon « Musique ») jusqu'au départ de la chanteuse...puis une résurrection avec une nouvelle vocaliste et enfin l'arrêt final en 2010.